26 Jan 2012
Jean-Luc Deuffic

Simon d’Orléans, enlumineur (XIIIe s.)

Assez rares sont les enlumineurs à signer leurs oeuvres. Simon d’Orléans (Simon Dorliens) se présente ainsi comme l’exécuteur d’un exemplaire du traité de fauconnerie de Frédéric II, dans une traduction française, faite à la demande de Jean, sieur de Dampierre, d’Isabelle de Brienne, sa femme, de Guillaume, son fils et de demoiselle Jeanne de Vignory (= Jeanne de Chalon, dame de Vignory), épouse de ce dernier. (Paris, BnF, Fr. 12400, fin XIIIe s.)


« simon ¤ dorliens // anlumineur ¤ // dor ¤  anlumina // se livre ¤ si » (f. 186)


f. 1v : iehan cheualier descendu de // tres noble lignie nei de sainte // racine signor de dampierre et // de st disier et a la reuerence de // ma douce dame ysabel dame // de ces meismes leus descendue // de tres haute sainte lignie de // roys et a lonor de tres noble da//moisel Guillaume lor fil et a // la grace de tres noble damoisel//le iehanne de woingnonri ma//dame ione…


© Paris, BnF, Fr. 12400, f. 1. Un fauconnier renseigne un moine, assis devant un copiste,


© Paris, BnF, Fr. 12400, f. 167.

L’enlumineur Simon, de par son nom, doit être originaire d’Orléans. Son style, par contre, est encore discuté :  le Rémois ou la Champagne, Metz ?. Jean Wirth, Isabelle Engammare, Andreas Bräm, Les marges à drôleries des manuscrits gothiques, 1250-1350, Droz, 2008, p. 47, note 12.

Manuscrit numérisé sur Gallica

BIBLIO :
Manuscrits à peintures, Paris, 1955, p. 45, n° 97.
\”Du Traité de fauconnerie composé par l’empereur Frédéric II, de ses manuscrits, de ses éditions et traductions\”, dans Bulletin du Bibliophile, 16e série, 1864, p. 885 sq. [ en ligne ]
The Art of Falconry, by Frederick II of Hohenstaufen, translated and edited by Casey A. Wood, F. Marjorie Fyfe [ en ligne ]

Patrick M. de Winter, \”Simon d’Orléans enlumineur des ducs de Bar\” : résumé. In : Congrès national des sociétés savantes (103 ; 10-15 avril 1978 ; Nancy, Metz). Paris : Ed. du C.T.H.S., 1978, p. 67.
Hélène Toubert et Laura Minervini, éd. — Federico II. De arte venandi cum avibus. L’art de la chace des oisiaus. Facsimile ed edizione critica del manoscritto fr. 12400 della Bibliothèque Nationale de France. Naples, Electa Napoli, 1995 (présentation en ligne)

Classes BnF
ARLIMA – pour la bibliographie et sources

24 Jan 2012
Jean-Luc Deuffic

Enlumineurs angevins : Thomas de Bacigne et Fouquet

Le manuscrit 772 de la Bibliothèque municipale d’Angers, Intitulatio anniversariorum et gaingnagiorum ecclesie collegiate Sancti Petri Andegauensis, est un Livre des anniversaires de l’église collégiale de Saint-Pierre d’Angers, composé en 1497. Mais comme beaucoup d’ouvrages de ce type il reprend des notices bien plus anciennes …
Nous y avons reconnu les noms de deux enlumineurs, dont un semble-t-il inédit :
Au f. 30 : pour leur anniversaire, le jour de la fête de saint Augustin (28 août), Thomas de Bacigne, enlumineur, et sa femme offrent à la collégiale un missel \”remarquable\”. Difficile de dater l’époque où exerçait Thomas…
A. Thome de Bacigne illuminatoris et eus uxoris qui nobis legavit unum missale notabile ad usum burse anniuersariorum. Super nouis.


(c) Angers BM, 772, f. 27.

\”BACIGNE\” pourrait faire penser à Bassigné, un lieu-dit situé à Coglès en Bretagne (Ille-et-Vilaine), dont les seigneurs étaient les de Champeaux. Simple hypothèse ….
Quant à l’autre enlumineur, il figure, f. 37 : \”A. (= Anniv.) Fulqueti illuminatoris\”. Le nom sera porté plus tard par un des plus grands enlumineurs, Jean Fouquet.
Célestin Port l’avait déjà remarqué dans son étude sur Les artistes angevins, peintres, sculpteurs, maitres-d’œuvre, architectes, graveurs, musiciens, Paris / Angers, 1881, p. 114 :
Fouquetus, illuminator, enlumineur, demeurait, en 1250, au carrefour de la rue des Ecuyers, aujourd’hui Grand Talon (= rue Plantagenêt), in quadrivio vici Armigerorum. BM d’Angers, Privilèges de l’évêché, ms 637, f. 12.
En cette rue des Ecuyers, au XIIIe s., l’évêque de Nantes Galeran possédait son manoir, entouré de vignes, acquis en juin 1250, et qui pendant près de trois siècles resta du domaine de l’évêché nantais.
L’antique église de Saint-Pierre d’Angers, attestée à l’époque de l’évêque Maurille (423-453), devenue collégiale au XIe s., fut détruite en 1791. Gohard, évêque de Nantes, mais angevin, s’y était fait inhumé.

24 Jan 2012
Jean-Luc Deuffic

In memoriam : Louis Lemoine (1943 – † 21 janvier 2012)

Nos pensées vont aujourd’hui vers l’ami Louis Lemoine, décédé à Pleumeur-Bodou, ce 21 janvier 2012. Agé de 68 ans, Louis fut de l’aventure de Landévennec, qui vit, avec le Colloque du cinquième centenaire de l’abbaye Saint-Guénolé, la naissance du Cirdomoc. Sa thèse de doctorat ès-lettres présentée en 1985, sous la direction de Léon Fleuriot,  fut consacrée aux Recherches sur l’enseignement et la culture dans la Bretagne du haut Moyen Âge. Enseignant à l’IUT de Lannion, il s’était spécialisé dans l’étude des scriptoria bretons.

BIBLIOGRAPHIE
(non exhaustive)

\”Note sur les Hisperica Famina et la Bretagne\”, dans Mélanges Hubert Guillotel, Rennes, PUR & Britannia Monastica, 13/14, 2010, p. 215-224. [ lien Cirdomoc ]
\”Paléographie et philologie médiévales : Existe-t-il des \”symptômes armoricains\” ?\” , dans A travers les îles celtiques. A-dreuz an inizi keltiek Per insulas scotticas. Mélanges à la mémoire de Gwénaël Le Duc, Rennes, PUR, CIRDoMoc ; Klask, 2008, p. 185-199.
\”Réécriture de l’Écriture\”, dans Britannia monastica, 9, 2005, p. 13-22. [ lien Cirdomoc ]
\”Autour du scriptorium de Landévennec\”, dans Corona monastica : moines bretons de Landévennec: histoire et mémoire celtiques : mélanges offerts au père Marc Simon (ed. B. Merdrignac et L. Lemoine), Rennes, PUR, 2004, p. 155-164. [ lien Cirdomoc ]
\”La Borderie et l’évangéliaire de Tongres\”, dans Bulletin et mémoires de la Société Archéologique et Historique d’Ille-et-Vilaine, tom. 106, 2002, p. 49-64
\”Contribution à la reconstitution des scriptoria bretons du haut Moyen Âge\”, dans Archivum latinitatis medii aevi, vol. 59, 2001, p. 261-268.
\”Maniérisme et Hispérisme en Bretagne. Notes sur quelques colophons (VIIIe-Xe siècles)\”, dans Annales de Bretagne, vol. 102, 4, 1995, p. 7-16.
\”Signes de construction syntaxique dans les manuscrits bretons du haut Moyen Âge\”, dans Archivum latinitatis medii aevi, vol. 52, 1994, p. 77-108.
\”Notes paléographiques\”, dans Mélanges Léon Fleuriot, 1992, p. 141-147.
\”Symptômes insulaires dans un manuscrit breton de l’Ars de verbo d’Eutychès\”, dans Etudes celtiques, vol. 26, 1989, p. 145-157.
\”Scrutari \”lire\” et pingere \”écrire\”. Note sur le colophon du Vatican Regina 296\”, dans Etudes celtiques, vol. 25, 1988, p. 233-236.
\”Les méthodes d’enseignement dans la Bretagne du haut Moyen Âge d’après les manuscrits bretons : l’exemple du Paris, B.N., Lat. 10290\”, dans Landévennec et le monachisme breton dans le haut Moyen Âge, 1986, p. 45-63.

LIENS
Site du CIRDOMOC

Abbaye Saint-Guénolé de Landévennec

19 Jan 2012
Jean-Luc Deuffic

Les Heures de René d’Anglure et de Catherine de Bouzey : University of Kentucky Libraries, Kentuckiensis IX

Le professeur Scott Gwara (Université de Sud-Caroline), dont on connait assez la passion pour les manuscrits, m’ayant contacté en vue d’identifier les armes d’un Livre d’heures (composite) de la Bibliothèque universitaire de Kentucky (USA, Special Collections, Kentuckiensis IX), la résolution de l’énigme ne s’est pas faite attendre (note1, voir in fine). Avec le précieux concours de François du Fou, les possesseurs représentés au bas d’une miniature de la Pieta, au f. 128, ont été assez vite reconnus : il s’agit de René d’Anglure et de Catherine de Bouzey,
Mariés le 6 mai 1485 par contrat, René d’Anglure, chevalier, vicomte de Blagny, conseiller et chabellan du roi, et Catherine de Bouzey, fille de nobles personnes Jean de Bouzey, seigneur de Saint-Germain, et de Marguerite de Brions, dame de Givry, portaient respectivement : écartelé aux 1 et 4, d’or semé de croissants de gueules soutenant chacun un grelot d’argent (Anglure), aux 2 et 3, à 3 pals de vair au chef chargé d’une merlette (Châtillon), et : d’or au lion de sable (de Bouzey).
René d’Anglure était le fils de Simon, dit Saladin d’Anglure, vicomte d’Etoge, chambellan de René d’Anjou, chevalier de l’Ordre du Croissant (+ aout 1499) et de (marié en 1458) Jeanne de Neufchâtel, vicomtesse de Blaigny, dame d’Ancy-le-Franc, morte en juillet 1504, fille de Humbert de Neufchâtel, seigneur de Nanteuil-la-Fosse et de Claude de Tannerre, dame de Plancy. 


© University of Kentucky Libraries, Special Collections. Manuscrit Kentuckiensis IX, f. 128. Pieta. Avec la permission de Matt Harris et de ses collègues.

Catherine de Bouzey présentée par sainte Catherine (avec sa roue) ; René d’Anglure par saint René, évêque de Naples (cette partie est très effacée, mais on devine la crosse et la mitre. Voir la totalité du folio).
La prière \”Vray Dieu de pitié et // vous benoiste pucelle …\” me semble inédite. Pour une description plus complète et quelques illustrations voir le site de la Bibliothèque universitaire de Kentucky [ en ligne ]. Curieux manuscrit composé de deux Livres d’heures bien distincts et de date éloignée (XIV et XVe siècles).

La tombe commune des possesseurs du Kentuckiensis IX, René d’Anglure et son épouse, Catherine de Bouzey, peut se voir à Etoges (Champage-Ardenne, France), dans l’église Saint-Sulpice- Saint-Antoine. Sur la dalle de marbre noir se lit cette épitaphe (lecture de Moreri) :

Cy gist messire René d’Anglure en son vivant chevalier vicomte seigneur d’Estoges & de Ferchampenoise ayant la charge & conduite de cent hommes d’armes au service des rois de France en leurs guerres tant en France qu’en Italie aux batailles de Pandin*, Ravenes**, Ecte*** & autres batailles & rencontres qui trépassa le sixième jour d’octobre 1529 & dame Catherine de Bouzey sa femme & épouse dame de Givry en Argongne issue & sortie de hauts & puissans princes messieurs les comtes de Rodemack laquelle trépassa le dixième jour de mai l’an 1527 [* Pavie : 1525 ; ** Ravenne : 1512 ; *** Sainte-Brigitte ] :


[ Source ]

ETOGES, église Saint-Sulpice-Saint-Antoine : tombeau composé de 2 gisants en albâtre et d’une dalle avec épitaphe (restauré) – Le lion, symbole de la force et du pouvoir, est généralement associé à l’homme, alors que pour la femme, l’animal est le lévrier, symbole de fidélité : voir par exemple le tombeau de François II de Bretagne, à Nantes, ou celui de René de Beauvau et Claude de Baudoche au Musée Lorrain  © Inventaire – Merci à François du Fou pour cette remarque.


Armes d’Anglure / Châtillon sur le monument funéraire de François d’Anglure – © Inventaire

BIBLIO : Robert Neuville, Les Gisants de l’église d’Etoges, 1969 (non consulté). – Généalogie d’Anglure, branche des comtes d’Etoge, par Moreri en ligne –  La galerie d’Etoges en ligne

MANUSCRITS EN RELATION

Stockholm, Koninklijke Bibliotheek. Ms. A 228, Heures à l’usage de Cambrai de Marie de Verres et de François d’Anglure, fils de René d’Anglure. 38 grandes miniatures. Notes sur la famille de François d’Anglure. 2 campagnes, dont  ca 1480, atelier de Simon Marmion. Quand la peinture était dans les livres : Melanges en l’honneur de Francois Avril, Brepols, 2007, p. 149-150. Illuminated manuscripts and other remarkable documents from the collections of the Royal Library, Stockholm, Catalogue exposition, juin-sept. 1963, Stockholm, 1963, p. 14. [ Hanno Wijsman : Luxury Bound ]

Paris, BnF, Fr. 20318. Début XVe s. Valère Maxime, trad. de Simon de Hesdin, Faits et dits memorables. Armes d’Anglure / Châtillon dans l’initiale du f. 1.


© Paris, BnF, Fr. 20318, f. 1. Début XVe s. Page frontispice de Valère Maxime, trad. de Simon de Hesdin, Faits et dits memorables
Voir notice du manuscrit sur le site de l’ENC, Miroir des classiques (Frédéric Duval et Françoise Vielliard)


© Paris, BnF, Fr. 25204. Statuts de l’ordre du Croissant, fondé par René d’Anjou (1448), f. 46. \”Messire Saladin d’Anglure Vicomte d’Estauges // & Seigneur de Nogent\”, père de René d’Anglure Base BnF Images.


© Paris, BnF, Fr. 25238 [ source : gallica ] – Merci à François du Fou pour m’avoir signalé ce ms.

GLANES GENEALOGIQUES DES BOUZEY

… Il aurait aussi apparu aux dits commissaires, par une sentence des assises de notre dite province de Vôge du 19 décembre 1435 par le testament du dit sieur Thiriet de Bouzey du 21 avril 1436, et par le partage des biens du 25 novembre. Avant comme aussi par deux autres titres des années 1473 et 1499 que le sieur Guillaume de Bouzey qui avait épousé Jeanne de Malain, et le sieur Liébaut de Bouzey marié à catherine de Thuillières, étaient frères des dits Vautrin et Jean Bougno de Bouzey. Que Barbe de Bouzey aurait épousé le sieur Jacques de Savigny, seigneur de Monthureux, et que Catherine de Bouzey aurait été mariée au sieur René d’Anglure, vicomte d’Estôges et de Bassigny. Le sieur Nicolas de Bouzey, seigneur du dit Boouzey, du Ballion de Saint Elophe et de Brancourt voulant imiter ses ancêtres aurait épousé Didière de Barezey, dont il aurait eu le sieur Mengin de Bouzey, auquel il aurait inspiré ses sentiments, ce qui aurait été reconnu par l’alliance qu’il aurait contracté le 30 juin 1496 avec damoiselle Adeline de Salvan, fille du sieur Jeannon de Salvan, seigneur de Valleroy aux Saules, et de dame Adeline d’Autrey son épouse, le sieur Jean de Bouzey, seigneur de Dombrot et de Saint Germain, fils du dit Jean Bougno de Bouzey et petit-fils de thiriet de Bouzey, les sieurs Georges de Savigny, Jean du Moustier et François de la Vaux, auraient assisté à la passation de leur contrat de mariage, par lequel il aurait été stipulé, qu’en considération d’une donation de dix huit mille francs de préciput qui aurait été faite à la dite Adeline de Salvan par ses pères et mères, les enfants qui naîtraient de leur mariage seraient tenus et obligés de porter les noms et armes de la Maison de Salvan, et ne pourraient reprendre celui et celles de Bouzey qu’en cas que la ligne collatérale de la Maison du dit Bouzey viendrait à s’éteindre, ce qui aurait été observé par le sieur Jean de Bouzey, leur fils, seigneur du dit Bouzey qui aurait commencé à porter le nom de Salvan, pour lors éteint, il aurait épousé damoiselle Antoinette de Montfleur, fille du sieur Georges de montfleur, seigneur de Fontenoy les Montbozon, et de dame Marguerite de Pauyette, et dans la passation de leur contrat de mariage du 28 juin 1547… [ source ]

LIENS

<> La page de Scott Gwara
<> Le département Special Collections de l’Université de Kentucky

<> Abrégé de la vie de saint René, évêque d’Angers ; par l’abbé René[ numérisé sur Gallica ]

© Paris, BnF, Latin 1156A, f. 61. Ca 1435. Heures de René d’Anjou : saint René et portrait de Louis II d’Anjou. Maître de Rohan.

POSTSCRIPTUM
(1) François AVRIL me fait savoir qu’il avait déjà lui-même identifié René d’Anglure et Catherine de Bouzey dans le Kentuckiensis IX , information publiée par [Maxence Hermant, \”La commande artistique en Champagne du Nord au XVIe siècle : les vicomtes d’Étoges et leurs tombeaux\”, dans Etudes marnaises, 2006, p. 95-120. Je l’en remercie. Dans ce même article Maxence Hermant (BnF) identifie les armes du ms BnF, Lat. 20318, cité plus haut.

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