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3 Mai 2008
Jean-Luc Deuffic

Alain & Aufred Gontier : deux maîtres bretons cornouaillais du XIVe siècle

Parmi les maîtres bretons qui s’illustrèrent au Moyen Age figurent les cornouaillais Alain et Aufred Gontier. Contemporains, on peut supposer qu’ils étaient frères ou du moins proches parents.
Le premier, le plus connu, fit ses études comme boursier au célèbre collège parisien de Sorbonne, lisant les III/IVe Livres des Sentences (Thomas d’Aquin). Son nom se retrouve ainsi sur le manuscrit Paris BnF Latin 16144 : « Memoriale magistri Alani Gunteri qui studet super tertium et quartum librum Sententiarum celi et mundi pro X turis ( ?) nigris, die mercurii ante festum inventionis s. Stephani XCV (= 1295) ». Ce manuscrit, laissé en gage à la Sorbonne par Alain Gontier, passa par la suite entre les mains de maître Etienne de Genève qui le léga définitivement au collège au début du XIVe s. Présent à Paris en octobre 1308, il est déjà à cette époque qualifié de chanoine de Saint-Quentin en Vermandois. Ce détail permet d’attribuer à la « librairie » du maître le manuscrit 50 de la Bibliothèque municipale de Vendôme, ouvrage de saint Grégoire datant du XIIIe s. où se lit cette note : « Detur iste liber magistro Alano, Sancti Quintini canonico ».
En 1315, théologien éminent de la faculté de Paris, « doctor in sacra pagina », il est nommé grand maître du collège royal de Navare, récemment fondé. En Bretagne, il obtient une prébende comme chanoine de la cathédrale de Nantes, et la cure de Bothoa, en Cornouaille (auj. Côtes d’Armor). Le 15 mars 1317 il est nommé à l’évêché de Saint-Malo, où il remplacera le chapitre cathédrale de chanoines réguliers de Saint-Victor (que le docte saint Jean de la Grille avait introduit) par de simples chanoines séculiers (bulles de Jean XXII, datée du 27 octobre 1319). Cette charge, il avait hésité à l’accepter. Notre docteur en théologie, chanoine de Nantes, et clerc du roi, fut appelé avec insistance par le pape, rappelant qu’il avait longtemps vécu à la curie, que sa science et sa vertu, son caractère pacifique et respectable, étaient bien connus de lui et de ses cardinaux, que le roi lui-même le lui avait souvent recommandé, et qu’il avait besoin en Bretagne de prélats « circonspects, sûrs, constants ». Alain Gontier restera à Saint-Malo durant 16 années, pour être placé à la tête du diocèse de Cornouaille le 22 janvier 1333. Il n’y restera que quelques mois, décédant en 1335. Le catalogue des évêques de Quimper précise: « Alanus Gontery, bonus clericus et audax magister in theologia, natus de Cornubia ».
De sa carrière d’enseignant, qui dut se dérouler entre 1308 et 1317, il nous reste des « Questions » qu’Auguste Pelzer a étudiées à partir du recueil Vatican Latin 1086 (f. 237-244v)


Vendôme 50. Gregorius, Moralia in Job. f. 11v.
© Institut de recherche et d’histoire des textes – CNRS
 
Auffred Gontier fut franciscain. Sans doute affilié au couvent des cordeliers de Quimper où s’illustrera Jean Discalceat, il se trouve en juin 1303 à Paris, où il remplit les fonctions de « socius » auprès d’Alain de Touraine, maître en théologie. Il y reçoit sa licence, puis dans les années 1322-1325 il occupe la chaire de lecteur au « Studium generale » de Barcelone, fait révèlant qu’il avait acquis une renommée de professeur peu commune. Un autre Breton, Guillaume de Vaurouillon écrira de lui plus tard qu’il fut un remarquable disciple de Scot, « suus egregius discipulus ». En effet, la présence du « Docteur subtil » à Paris en 1303 explique sans doute que notre Breton ait suivi les cours du célèbre maître et se soit ainsi profondément imprégné de sa doctrine.
Un des manuscrits qui contient ses écrits sur les Sentences (Breslau) porte au f. 306r, à la fin du Commentaire du Livre I, ce colophon : « Explicit compilatio lecture primi Sententiarum ordinata per fratrem Anfredum Gonteri, britonem, de ordine fratrum Minorum, sacre theologie baccalaureum Parisius, anno Domini M°CCC°XXV° », et à la fin du Livre II, f. 708v : « Explicit compilatio et ordinatio super 2um librum Sententiarum edita per fratrem Amffredum Gonteri, britonem, de ordine fratrum Minorum et de provincia Turonie, tunc lectorem in provincia Aragonie in conventu Barcinone in Studio generali, anno ab incarnatione Domini mill.mo CCCmo XXII. »
Curieusement un homonyme, « Magistri Auffredi Gonterii », archidiacre de Cornouaille, est cité au cartulaire de Quimper en 1335. Sans doute de la même fratrie.

Pocquet du Haut Jussé, Les papes et les ducs de Bretagne, p. 180-181.
Revue Neo-Scolastique, 1928, p. 316-351.
F. Delorme, Dicta du cordelier breton Aufred Gontier, dans Studi Francescani, 33, 1936, p. 164-179; 240-291.
Chris Schabel, Aufredo Gonteri brito secundum Henry of Harclay on Divine Foreknowledge and Future Contingents, dans Disputation, 1997, p. 159-195.
Fichiers IRHT (Garand)

16 Avr 2008
Jean-Luc Deuffic

Divers Manuscripts both Antient & Curious

Divers Manuscripts both Antient & Curious:
Illuminated Treasures from the Harley Collection
.
A Conference at the British Library, London 29-30 June 2009

One of the finest private libraries in Europe was formed in the eighteenth century by Robert Harley, Earl of Oxford and his son, Edward. Consisting of 7,639 manuscripts, 14,000 charters, and countless printed books, the collection was kept by the Harleys’ librarian, Humfrey Wanley, whose humble origins and lack of academic qualifications did not prevent him from becoming one of the most celebrated antiquaries of his day. After its purchase for the British nation in 1753, the Harleys’ private library was transformed into an unparalleled public resource; today it forms one of the most important foundation collections of the British Library. Access to the extraordinary riches of the Harley collection is now greater than ever courtesy of a generous Getty Foundation grant funding the creation of an online catalogue of illuminated Harleian manuscripts. By the end of the project, in June 2009, descriptions and digital images of over 2000 magnificent manuscripts, once thumbed only by a privileged few, will be available to all at the click of a mouse.
To celebrate and advertise this achievement, on 29-30 June 2009, the British Library is hosting an academic conference on illuminated Harleian manuscripts. Scholars from all disciplines are invited to submit proposals for twenty-minute papers, but historians of visual culture are particularly encouraged to apply and preference will be given to presentations that include images. Papers that treat renowned Harleian holdings and those focusing on lesser known manuscripts are equally welcome. All potential contributors are encouraged to consult the British Library’s online Catalogue of Illuminated Manuscripts, which is rapidly expanding and currently supplies information relating to over 700 Harley manuscripts (see link below).
If you would like to take part, please send a one-page abstract and a concise CV to Deirdre Jackson at:
The British Library, 6 Euston Road, London, NW1 2DB deirdre.jackson@bl.uk
[ Link ]

Source:
Dr Catherine Yvard
Project Officer – Catalogue of Illuminated Manuscripts
The British Library

15 Avr 2008
Jean-Luc Deuffic

Alain de Rosnyvinen

J’ai déjà cité à plusieurs reprises la riche bibliothèque Carnégie de Reims au sujet de manuscrits bretons ou ayant un rapport étroit avec la Bretagne (notamment dans la collection Guy de Roye). Le fonds P. Tarbé (Carton VI. No 59) contient un certificat d’Alain de Rosnyvinen, capitaine général des francs archers des évêchés de Saint-Brieuc et de Tréguier, attestant qu’en la montre des francs archers de la paroisse d’Yffiniac, Matelin Durand a été reçu pour franc archer de cette paroisse (28 avril 1477)

Cet Alain de Rosnyvinen eut maille à partir avec sa famille au sujet de la garde du château de la Roche Maurice (1), une des importantes forteresses du Léon (Finistère) au Moyen Age.

\” Le 22 novembre 1472 le duc de Bretagne François II institua Louis de Rosnyvinen, capitaine de la Roche, en l’absence du vicomte de Rohan. Ce seigneur ayant disparu subitement de son château, pour passer à la cour de Louis XI, le duc avait pris de là occasion de disposer de la place, de la faire réparer et d’y nommer un commandant, « destituant dudit office tous autres qui par avant ces heures y auraient esté instituez par ledit vicomte ou ses curateurs. »
Louis de Rosnyvinen étant mort en 1479, le duc de Bretagne donna la garde du château à Guillaume, fils puîné de Louis, « se confiant à plain sur la loyauté et diligence de ce bien aymé et féal escuyer ». Rosnivinen eut ordre de se renfermer dans sa place avec six hommes, qui devaient y résider en habit de guerre et à cent sous par mois chacun. Mais quand ou voulut entrer dans la place, on trouva les portes bien fermées. Alain de Rosnyvinen, seigneur de Keranc’hoat, prétendant, comme ainé noble, qu’il devait succéder à son père dans le gouvernement de la Roche, de préférence à Guillaume, son frère cadet, s’était emparé des clefs du château, qu’il ne voulait plus rendre malgré l’ordonnance du duc. Il fallut, pour l’y contraindre, avoir recours aux voies judiciaires, et le 16 février février 1479 Alain fut condamné, à la barre de Lesneven, « à bailler les clefs du chasteau et les biens y estant » à son frère Guillaume, qui fut mis en possession, par Yves de Keraudy, receveur du lieu …\”
Source: Le Lycée armoricain, II, 1823, p. 351-352
Ce passage, signé de Miorcec de Kerdanet, doit être revu. Le Guillaume de Rosnyvinen en question n’était pas le frère cadet d’Alain, mais celui de Louis. Il fut seigneur de La Gromillais et de Champorin, capitaine de Dinan et de Vire, chambellan du duc de Bretagne, grand-maître des Eaux et forêts de France, premier échanson de France, décéda en 1495, inhumé aux Cordeliers de Dinan.
Alain de Rosnyvinen, qui épousa Jeanne de Guitté, dame héritière de Bois-Morin, mourut le 5 octobre 1512, et fut inhumé dans l’enfeu des Keranc’hoat, à l’abbaye Notre-Dame de Daoulas.
Sources:
Arbre généalogique de la noblesse bretonne
[Lien]
Extrait de la Réformation (1668), sur le site Tudchentil
[Lien]
Illustration: Ruines du château de la Roche Maurice. Construit au 13e siècle, puis restauré et agrandi après 1420. En 1490, l’édifice est pris d’assaut par les troupes royales puis abandonné. © Monuments historiques, 1992.

Autres pièces du fonds Tarbé de la Bibliothèque Carnégie de Reims concernant la Bretagne ou les Bretons:
§ Carton IV. No 153: Mandement de Jean de Malestroit, évêque de Saint-Brieuc, chancelier du duc de Bretagne, ordonnant à Denisot de Villy, receveur des aides de la guerre à Évreux, de payer une somme au susdit duc de Bretagne (Paris, 24 septembre 1415)
§ Carton V. No 39: Attestation adressée au trésorier du roi à Nîmes par Henri de Rosnivinen, châtelain et viguier de Beaucaire, lieutenant de Tanguy du Chastel, prévôt de Paris, pour lui certifier que Brisset de Kerprezen, maître de l’artillerie du château royal de Beaucaire, a bien rempli son office de la Saint-Michel à Noël (5 janvier 1436)
§ Carton V. No 38: Convention passée en la cour de Rennes entre Thomas de Québriac et Bertrand de Montboucher, à l’occasion du mariage de leurs enfants, Thomas, fils aîné du sire de Québriac, et Jeanne de Montboucher, dame de Beloçac, fille aînée de Bertrand (13 juillet 1435)
§ Carton IV. No 70: Quittance donnée par Gui de Guingant, clerc et notaire du roi, d’une somme reçue pour ses gages de Jean le Grand, vicomte de Caen (24 juin 1386)
§ Carton V. No 60: Quittance donnée par Prégent, seigneur de Coëtivy, amiral de France, gouverneur et capitaine de la ville de la Rochelle, d’une somme reçue, pour ses gages de gouverneur, de Bernard Cain, receveur ordinaire du roi au pays de Saintonge (15 juin 1441)
§ Carton V. No 76: Quittance donnée par Tanguy du Chastel, conseiller et chambellan du roi, d’une somme reçue pour sa pension d’Étienne Petit, receveur général au pays de Languedoc (15 juin 1446)
§ Carton V. No 96: Lettres de François 1er, duc de Bretagne, et d’Arthur, comte de Richemont, connétable de France, accordant à Pierre Raguenel, leur écuyer, en récompense de ses services, tous les deniers restant des fermes de la coutume de la vicomté de Carentan (Carentan) (4 octobre 1449)
§ Carton V. No 99: Lettres d’Arthur de Bretagne, comte de Richemont, connétable de France, ordonnant au vicomte de Coutances et aux élus en cette vicomté, de rembourser à Raoul de Bruilly, écuyer, les dépenses qu’il a faites, lorsqu’après la conquête de la basse Normandie par le duc de Bretagne et par le connétable, il s’est rendu près de ceux-ci en Bretagne, en la compagnie de Richard Varrot, chanoine de Coutances, et de Guillaume Lecoq, lieutenant général du bailli de Cotentin, délégués, ainsi que lui, par les gens d’église, nobles et bourgeois de la ville et vicomté de Coutances, pour présenter des observations sur l’état du pays (Coutances) (20 mai 1450)
§ Carton V. No 122: Ordonnance d’Olivier, seigneur de Coëtivy, chambellan du roi et son grand sénéchal de Guyenne, répartissant entre trois hommes d’armes de sa charge une somme que le roi leur a accordée pour se procurer des harnais )2 juillet 1458)
§ Carton VII. No 95: Lettres de Charles, comte de Taillebourg, seigneur de Coëtivy, prince de Mortagne-sur-Gironde, attestant qu’il a reçu la foi et l’hommage lige de Jean de Coudun, écuyer, seigneur de Migré, pour son château, terre et seigneurie de Migré, qu’il tient du dit comte à cause du château et comté de Taillebourg (au château de Taillebourg) (15 juillet 1505)
§ Carton VII. No 21: Vente faite par François de Mauriet, prêtre, demeurant à Magné, à Huguet Rousseau, marchand, demeurant à Coulon, d’une maison avec ses dépendances, sise à Magné (Niort, 31 janvier 1488) ; au dos, quittance de Catherine de Coëtivy, dame de Magné, qui reconnaît avoir reçu de Huguet Rousseau « les ventes et honneurs » des choses par lui acquises Date : 10 mars 1488
§ Carton VI. No 87: Lettres de François II, duc de Bretagne, qui institue Guillaume du Chastelier capitaine des francs archers et élus des paroisses de l’évêché de Dol, à la mort de son frère Alain du Chastelier qui exerçait le même office (Nantes) (4 décembre 1482)
§ Carton VII. No 17: Mandement de Pierre de Laval, archevêque de Reims, premier pair de France, et évêque de Saint-Malo, ordonnant aux receveurs de sa cour spirituelle de Saint-Malo de payer les gages annuels d’Yves le Faucheurs, son conseiller (Saint-Malo) (2 février 1487)
§ Carton VII. No 43: Aveu de Jeanne de Malestroit, veuve de Tanguy du Chastel, en son vivant conseiller et chambellan du roi, qui reconnaît tenir noblement de Gui, comte de Laval et de Montfort, seigneur de Vitré, à cause des seigneurie et baronnie de Vitré, le domaine de la Haute-Maison, situé sur les paroisses de Saint-Martin de Vitré et d’Erbrée (Beaumont) (21 novembre 1492)
§ Carton VII. No 96: Lettre de Gui, comte de Laval, sire de Vitré, qui, en sa qualité de comte de Laval, confère à Thomas de Rouellis, docteur en médecine, l’administration de l’Hôtel-Dieu de Saint-Julien de cette ville (Vitré) (1er octobre 1505)
§ Carton VII. No 101: Lettre missive de Claude de Seyssel au duc de Savoie (Charles III), au sujet du mariage de Jacques de Rohan, sire de Léon, des voyages projetés du roi de France et de Louise de Savoie, comtesse d’Angoulême, etc. (Tours) (21 juillet [1506])
§ Carton VIII. No 57: Lettres de François de Bretagne, comte de Vertus, qui donne à Claude de la Gravelle, son maître d’hôtel, en récompense de ses services, une somme due au dit comte pour le reste du quint denier de la terre et seigneurie de Toulon, sise dans le comté de Vertus (Saint-Germain-en-Laye) (29 juin 1523)
Site de la bibliothèque Carnégie de Reims

(1) Petit clin d’oeil à notre ami Jean Kerhervé! J’avais \”sous le coude\” un bref papier sur le testament (Paris BnF Moreau 1162, f. 210-223) de Guy Raoul,« fils de Yvon Raoul né de la ville de la Roche Morice en l’evesche de Leon en Bretaigne », lequel fut prévôt de la collégiale de Saint-Aubin de Guérande, mais je m’aperçois que Olivier Guyotjeannin y consacre un article dans \”Le prince, l’argent, les hommes au Moyen Âge\” (voir sommaire sur le site Tudchentil) …

13 Avr 2008
Jean-Luc Deuffic

Le Livre d’heures de Françoise Régnier et d’Anne Gauquelin : Huntington Library HM 1170

Billet à paraître dans :
Jean-Luc Deuffic
Notes de bibliologie
Livres d’heures et manuscrits du Moyen Age identifiés

Pecia 7. 2008.
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