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24 Juin 2014
Jean-Luc Deuffic

« Les troys premiers livres de Diodore Sicilien », manuscrit de François 1er, dans les collections du marquis d’Assérac


© Musée Condé

Si Jean Emmanuel de Rieux, marquis d’Assérac, possédait une exquise bibliothèque, pour l’augmentation de laquelle il travaille avec un grand soin (Louis Jacob, 1644), il est assez étonnant d’y trouver hors ses domaines d’intérêt (astrologie judiciaire, art militaire), de superbes manuscrits. L’un d’entre eux a même une provenance royale et se trouve aujourd’hui conservé dans la prestigieuse bibliothèque du Musée Condé de Chantilly (ms 721). Son frontispice somptueux, peint entre autres par Jean Clouet, en 1534, a fait l’objet d’une étude de Cécile Scaillierez dans la Revue du Louvre (4/1996, p. 47-52).
Cet exemplaire des Troys premiers livres de Diodore Sicilien, traduit en français par Maistre Anthoine Macault, notaire, secrétaire et valet de chambre ordinaire du roy, est sorti très anciennement de la bibliothèque de François premier, portant encore sa reliure d’origine de veau brun à compartiments dorés, avec un semis de fleurs de lis et de F.

Au début de l’ouvrage, une grande peinture frontispice représente François Ier écoutant la lecture de Macault. Assis sous un dais fleurdelisé, devant une table recouverte d’un tapis vert, sont présents ses trois fils, de même que les grands officiers de la Couronne, parmi lesquels on reconnaît le grand-maître Anne de Montmorency, l’amiral Philippe Chabot et le chancelier Antoine Duprat. Ce frontispice fut reproduit dans l’édition donnée en 1535 par Geoffroy Tory.


La signature de Jean Emmanuel de Rieux sur la page de titre

Ce manuscrit enluminé par Jean Clouet, Noël Bellemare, et par le Maître de François de Rohan, a appartenu à Firmin-Didot (catalogue, 1810, n° 880), puis à M. Beckford, et finalement au duc de Hamilton. Lors de la vente faite à Londres au mois de mai 1889, il fut acquis par M. le duc d’Aumale. Nous n’avons pas encore l’explication de la présence d’un tel manuscrit dans les collections du marquis d’Assérac.

BIBLIO
Cécile Scailliérez, \”Un portrait méconnu de François Ier peint par Jean Clouet : le frontispice des Histoires de Diodore de Sicile au musée Condé de Chantilly\”, dans La Revue du Louvre et des musées de France, 1996, 46, 4 Cécile Scailliérez et Patricia Stirnemann, L’Art du manuscrit de la Renaissance en France, Somogy édition d’art / Musée Condé Château de Chantilly, 2001, p. 46-49.
Sur le manuscrit du Musée Condé : Geofroy Tory, peintre et graveur, premier imprimeur royal (1865).
Léopold Delisle : « Traductions d’auteurs grecs et latins offertes à François Ier et à Anne de Montmorency par Etienne Le Blanc et Antoine Macault », dans le  Journal des Savants, août et septembre 1900.

14 Juin 2014
Jean-Luc Deuffic

Le Landernéen « Charles de Rochemagne le Rouss », capucin, converti à la religion réformée (1619)

Traquant ex-libris et anciennes provenances, j’ai fait la rencontre récente d’une plaquette de 14 pages in-8° (non encore examinée) dont le titre en lui-même est assez significatif pour être publié entièrement :

Declaration de Charles de Rochemagne Ie Rouss, natif de Landernau en Basse Bretaigne, ci-deuant Capucin au conuent des Capucins de Chasteleraud, faite publiquement en l’Eglise Reformée dudit lieu, le Dimanche 22 de Septembre 1619. Ou sont contenues les raisons et motifs pour lesquels il a abjuré ses voeuz monastiques, et s’est retiré de dessous Ie joug de la Tyrannie Papale. Ne jugez point selon l’apparence, mais jugez d’un droit iugement. I Jean, 7 24. A Lodvn de l’impression de La-Barre, 1619.

Référence prise dans les Kerkhistorisch archief, volumes 1 à 2, Amsterdam, 1857, p. 414, le seul exemplaire connu, semble-t-il, se trouve aujourd’hui conservé à l’Université de Leiden (Special Collections (KL) Bibliotheque Wallonne, BIBWAL I 124: 1 ). Il y eut un second tirage, puisque les exemplaires de Paris, BnF (D2- 10764) et de la BM de Toulouse (Fa D 19218 (63), datés de 1620, offrent un libellé quelque peu diffèrent :

Declaration de Charles de Rochemagne le Rouss. natif de landerneau en Basse Bretagne cy devant Capucin au couvent des Capucins de Chasteleraud, faite publiquement en l’église réformée dudit lieu, le… 22. de janvier 1620. Où sont contenues les causes et motifs pour lesquels il a abjuré ses voeux monastiques et s’est retiré de dessous… la tyrannie papale. Jouxte la copie imprimée à Loudun, 1620.

« Charles de Rochemagne le Rouss », se dit natif de Landerneau. Le patronyme Rochemagne est inconnu à la Bretagne : s’agit-il d’une traduction française d’un nom breton (Rochemeur, Rosmeur ?) Probablement s’appelait-il « Le Roux ». Malheureusement nous n’avons pas trouvé trace de sa naissance à Landerneau, seuls les registres paroissiaux de la paroisse de Saint-Thomas remontent au-delà de 1600. Il ne fit certainement pas profession chez les Capucins de l’ancienne cité léonarde, puisque l’installation du couvent de cette ville ne date que de 1633. Il rejoignit donc celui de Chatellerault fondé en 1612 dans le faubourg Sainte-Catherine.
Quoiqu’il en soit, après sa conversion, Charles de Rochemagne, s’installa à Vitré, un des grands pôles, avec Nantes, du calvinisme breton (http://protestantsbretons.fr/histoire/etudes/questions-sur-vitre-1/)
En effet, son nom se retrouve dans les registres de l’église réformée de Vitré, à la date du 12 juillet 1620 (1), quand il se marie avec Anne Chapelais, née le 12 mars 1597 de Guy Chapelais, sieur de la Vigne, tailleur d’habits et de Judith de Launay.
Plusieurs enfants naîtront de son union avec Anne:
Elisabeth, 12 avril 1621
Charlotte, 11 mars 1622
Philippe, 5 avril 1624
Jeanne, 25 juin 1625
Marie, 18 novembre 1626
Philippe, 26 juillet 1628
Charles, 28 décembre 1630
Anne morte le 5 mars 1634, Charles de Rochemagne se réfugie par la suite à Guernesey, où il mourut à un âge très-avancé, en mars 1672 : 

Il remplissait dans l’église paroissiale de Saint-Pierre-Port l’office de Lecteur, c’est-à-dire de celui à qui il appartenait de lire les saintes Ecritures, de conduire le chant, et d’aider le ministre dans quelques-uns de ses devoirs. Il était aussi maître de l’école paroissiale. Il s’est remarié deux fois à Guernesey, d’abord en avril 1641, à Jeanne Arthur, et puis en mars 1653, à Marguerite Hodon  (Bulletin archéologique de l’Association bretonne, 1877, p. 33).

Gilles-André de La Roque de La Lontière, dans son Histoire généalogique de la maison de Harcourt, 1662, p. 622-623, fait mention de « Charles de Rochemagne Breton, en la généalogie manuscrite qu’il a publiée de la maison de Montgommery », qui sans aucun doute, se rapporte à notre personnage.

NOTE
(1) Je remercie Jean-Claude Bourgeois (groupe Généalogistes du Finistère) pour une précision concernant cette date.

BIBLIO
Paul Paris-Jallobert, Anciens registres paroissiaux de Bretagne: baptêmes, mariages, Volume 1, Eglise protestante de Vitré, Rennes, 1890,, p. 25, 140.
LIENS
Le blog de Jean-Yves CARLUER : Les Protestants bretons
LE PROTESTANTISME EN BRETAGNE AUX XVIe, XVIIe & XVIIIe siècles, par Jean-Luc TULOT

12 Juin 2014
Jean-Luc Deuffic

L’incunable de la « Cité de Dieu » du frère carme Bertrand Estienne


Bertrand Estienne
(ou Etienne, Bertrandus Stephani) et Jean Marchand (Johannes Mercatoris), carmes de la province de Touraine, bacheliers en théologie et lecteurs en l’Université de Paris, ont marqué l’histoire de l’imprimerie lorsqu’à la demande de Louis Martineau (également tourangeau), ils corrigèrent le commentaire de leur confrère anglais John Bacon sur le troisème livre des Sentences, qui sera imprimé à Paris le 15 janvier 1485 (n.s.). Cette précieuse édition in-folio est aujourd’ui conservée dans plusieurs bibliothèques (Durham, Ushaw College; Edinburgh UL (New College) ; Paris Mazarine; Valognes BM ; Leipzig UB ; Nürnberg StB ; Cambridge MA, Harvard College Library, Houghton Library, etc)

Nous avons eu la chance de découvrir le nom de Bertrand Estienne sur un autre incunable dont il fut un certain temps possesseur. En effet, à la Bibliothèque de la Sorbonne se trouve un exemplaire (Rés. In 70) de la Cité de Dieu de saint Augustin (De civitate Dei comment. Thomas Valois et Nicolaus Triveth), imprimé à Bâle par Johann Amerbach, le 13 février 1489, portant cette note manuscrite : « Ce livre appartient a fresre Bertram Estienne».
Par la suite, au courant du XVIe siècle, l’ouvrage a appartenu à Jérôme [?], religieux du prieuré clunisien de Saint-Martin des Champs à Paris, et au frère Jean, gardien du couvent (des Franciscains ?) de Quimper, sans que l’on ne connaisse exactement la chronologie de ses différentes possessions : « Dompnus Jheronimus [gratté] religiosus Sancti Martini de Campis sibi pertinet hunc librum, xiiii s. P. » ; « Ex libris fratris Johannis prepositi conventus Corizopitensis ». Un examen des écritures pourrait peut-être le déterminer.

SUDOC / Référence

Biblio : A. Claudin, L’histoire de l’imprimerie, t. 1, Paris, 1900, p. 300-301.
 

Exemplaire de la Cité de Dieu de la Bridwell Library

2 Juin 2014
Jean-Luc Deuffic

Le bibliophile nantais Joseph Arnoult et les statuts synodaux de Pierre du Chaffault et Jean d’Epinay

A peine achevé un premier état de notre INVENTAIRE DES LIVRES LITURGIQUES DE BRETAGNE, que je découvre la vente en ligne chez le libraire de Londres SOKOL BOOKS Ltd. d’un exemplaire des statuts synodaux des évêques de Nantes Pierre du Chaffault et Jean d’Espinay.

Les statuts de ces évêques nous sont déjà connus par deux manuscrits de la BnF :
Bibliothèque de l’Arsenal, 796 B, f. 67
BnF, Lat. 1597, f. 56
Les Statuta synodalia diocesis Nannetensis, de Pierre du Chaffault ont également été imprimés (s.d.). L’unique exemplaire se trouve à Nantes, au Musée Dobrée.
Le 23 mai 1499, ont été imprimés les : Statuts synodaux de l’église de Nantes promulgués par Yves du Quirisec, vicaire général de Jean d’Espinay, publiés à Nantes par Étienne Larchier (ou à Paris, par Jean du Pré). Exemplaire : Paris, BnF, Rés. B 2292

L’exemplaire manuscrit de Sokol Books Ltd porte l’ex-libris du médecin et bibliophile nantais Jospeh François Arnoult, qui fut docteur régent de la Faculté de médecine en l’Université de Nantes, recteur en 1776. Le 5 juin 1782, est inhumée à Saint-Clément de Nantes, son épouse Marie-Anne Rigault, âgée seulement de 38 ans,

Shapero Rare Books (London, GL, United Kingdom) met en vente actuellement un ouvrage très particulier de Conrad Gesner ( Christoph Froschauer, Zurich & Johann Wechel, Frankfurt), ayant appartenu à Charles de Bourbon (1520-1590), et plus tard à Joseph Arnoult.

L’Université de Glasgow conserve également un ouvrage de la collection du médecin nantais : Mudkhal al-kabīr ilā ʻilm ahḳām al-nujūm. Introductorium in astronomia[m] Albumasaris Abalachi octo continens libros partiales..

De même, Penn Libraries call number : IC5 Sa133 556e

Vente Bergé du 29 juin 2011, lot 22 :

Au-dessus de l’ex-libris de Jean Ballesdens (1595-1675), celui de Joseph Arnoult dans un ouvrage de Christophe FORSTNER Ad libros sex priores Annalium C. Cornelii Taciti notae politicae. Padoue, Paul Frambottum, 1626. 

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