22 Juin 2015
Jean-Luc Deuffic

Un voyage dans le temps : les heures d’Isabeau de Pontbriand (Rennes, BM, ms. 1277)


(c) Bibliothèque Rennes Metropole

Exécutées vers 1430, les Heures d’Isabeau de Pontbriand (+ 1449) nous offre un parcours assez exceptionnel dans le temps jusqu’à la première moitié du XIXe s., époque de son dernier possesseur connu, l’avocat Jacques-Marie Carron de La Carrière (+ mort à Rennes le 26 novembre 1839, âgé de 86 ans).
Le manuscrit 1277 de la Bibliothèque de Rennes Métropole est l’oeuvre probable d’un artiste local, dont Eberhard König a souligné le \ »charme très particulier\ » des miniatures. L’usage liturgique des ces heures étant celui de Saint-Malo on peut imaginer l’enlumineur issu de l’ancienne cité portuaire très prospère au Moyen Âge, mais rien d’assuré sur ce point. Ce que l’on sait avec certitude c’est qu’il fut possédé (et peut-être exécuté spécialement pour elle) par Isabeau de Pontbriand dont le nom est inscrit en lettres d’or en bout-de-lignes des litanies (f. 61v-62), d’une façon très originale :

Cez matinez sont [a] Ysabel du Pont briend,
qui les trouvera si les range sans les gardez longuement
et il ara sans faille
une bonne trouvaille
d’un pot de vin
ou de servaise
et sera a bien
lieu bien aise.

Au f. 140 une nouvelle note précise qu’Isabeau donna le livre d’heures à son fils Olivier de Villarmoye (ou Villermaye) qui lui même le transmis à sa nièce Jacquette Berthelot :

Ces heures furent a dame Isabeau
de Pontbriand dame de Beaulieu
en son temps et les donna Olivier
de Villarmoye son fils a Jacquecte Berthelot sa
niepce.
Ces heures appartiennent a Jacquecte
Berthelot fille de Jehan Berthelot et
Marguerite Jehanne Turpin quelle Jacquecte
fut née le vign et cincqme jour
de septembre 1489.

Jacquette Berthelot épousa Jean de Carcaing. Aussi les premières pages du manuscrit portent, entre 1510 et 1530, les baptêmes des 11 enfants du couple sur le modèle suivant :

Le cinquiesme jour d’aougst lan mil cinq cens dix fut batizé Janne Decarcaing fille de Jean Decarcaing et de damoiselle Jacquette Berthelot sa femme sieur et dame du Chastelet et la Mesnardiere et fut parain noble homme Jan de La Sercelle ? sieur de … et furent maraines Louyse Le Senechal dame de La Rouerye et Janne du Pontavice.

A sa mort, Jacquette Berthelot transmet le livre d’heures à sa petite fille Françoise de Carcaing, née en 1559, enfant de Gilles de Carcaing (né en 1519/1520), lequel épousa en 1543 Julienne de Horlande (née en 1524). Au reste, ces derniers ont noté aussi entre 1543 et 1566 les baptêmes de leurs 16 enfants.


(c) Bibliothèque Rennes Métropole

A son lit de mort, Françoise de Carcaing fait don du livre d’heures à sa soeur aînée Guillemette de Carcaing (née en 1547) qui épousa en 1574 Guillaume de Languedoc. Les plats de la reliure du manuscrit porte son nom, avec des fers représentant la Crucifixion et l’Annonciation:

reliure_complete.jpg

Et ladicte Guillemette de Carcaing a donné les / presantes heures a son filz Geffroy de Languedoc a son deceix qui fu la mardy 13e jour de febvrier 1624 environ onze heures du soir.

Et ledit Geffroy de Languedoc les ayant laissées par son decez a damoiselle Janne Pihier son espouse elle les a données a Gilles de Languedoc son fils priez Dieu pour eux ». (d’une autre main) « et Gilles de Languedoc les a données a Janne de Languedoc sa fille espouse de Me Bain procureur du Roy de police.

Apres la mort de ladite de Languedoc ces heures passèrent entre les mains de Gilles-Joseph Bain, sr de Bonabry, son fils, né à Rennes le 8 juillet 1698 qui y epousa en 17[blanc] Anne-Jeanne Regnaud; et après la mort dudit Gilles-Joseph Bain arrivée le [blanc] les mêmes heures appartinrent à Guy-Jean-Joseph Bain, son fils, né à Rennes, paroisse de Toussaint le 3 decembre 1730, mort à Chateaubriand le 17 mai 1797, il avoit épousé le [blanc] decembre 1767 paroissse d’Izé près Vitré Catherine Thuillier morte au dit Chateaubriand le 22 decembre 1773.

Le dit Guy-Jean-Joseph Bain donna les dites heures en 1794 à Jacques-Marie Carron son neveu à la mode de Bretagne, comme fils d’Hélène-Perrine Leloué, cousine germaine dudit Bain, laquelle Leloué étoit fille d’Anne-Jeanne Bain, soeur dudit Gilles-Joseph Bain cidessus et femme de Vincent Yves Leloué. Priez Dieu pour leurs ames.

On peut ainsi suivre avec une certaine émotion le parcours et l’histoire de ce livre d’heures sur près de 4 siècles, des années 1430, lorsqu’il appartenait à Isabeau de Pontbriand, jusqu’au décès, le 26 novembre 1839 à Rennes, de l’avocat (historien) Jacques-Marie Carron de la Carrière.

Manuscrit numérisé sur les Tablettes Rennaises

Acquis en 1985 à la vente Sotheby’s du 26 novembre, lot 128.
Nous préparons une édition complète des annotations de ce livre d’heures, et une étude sur l’histoire des différents possesseurs.

Biblio :

\ »Nobiliaire de Bretagne dressé en 1788 par Carron\ », dans Le cabinet historique, t. XII, 1866, p. 88-94, 118-120, 171-173, 206-212. Paul Parfouru, « Inventaire des archives de la paroisse Saint-Sauveur de rennes par Gilles de Languedoc, 1720 », dans Mémoires de la Société Archéologique d’Ille-et-Vilaine, t. XXVIII, 1899, p. 205-284. Gauthier AUBERT, « Gilles de Languedoc (1640-1731) bourgeois de Rennes, greffier de la Communauté de ville et son Recueil historique », dans Bulletin et Mémoires de la Société archéologique d’Ille-et-Vilaine, t. CII, 1999, p. 225-246 (renvoi à son mémoire de maîtrise de 1993). Trésors des bibliothèques de Bretagne : exposition, Pontivy, 1989, n° 23. Manuscrits à peintures, XIIIe-XVe siècles : exposition, espace Ouest-France, Rennes, 18 septembre-18 octobre 1992, p. 43-45.

18 Juin 2015
Jean-Luc Deuffic

La généalogie des Sanzay et Vincent de Penmarc’h

Avec le concours de l’Etat, La Médiathèque centrale d’agglomération Pierre-Moinot de Niort a pu en avril 2012 faire entrer dans ses collections un précieux manuscrit à peintures, Généalogie de la Maison de Sanzay en Poitou (Paris, mars 1569), enluminé sur vélin de 27 f. non chiffrés mesurant 364 x 272 mm.

On trouvera une excellente description de ce recueil sur le site du Catalogue collectif des médiathèques de la Communauté d’Agglomération du Niortais.
Un des exemplaires de cette généalogie, l’exemplaire « Valette », qui aurait appartenu à René III le jeune, comte de Groix, serait passé à son fils Anne de Sanzay (1), marié sans postérité à Marie de Tromelin, veuve du baron de Penmarch. Selon M. Surget, le document serait ainsi resté en possession des enfants de son premier lit, à commencer par Vincent de Penmarch comme l’indique un ex-libris manuscrit de la fin du XVIe siècle (plutôt XVIIe) au verso du folio 24 : « Ce présant livre appartient a hault et puissant Messire Vincent de Penmarch, seigneur et Baron dudict lieu ».


Cliquer pour agrandir.

Mais peut-être cet exemplaire vient-il directement de Jeanne de Sanzay, fille de René, qui épousa le 8 août 1599, Saint-Frégant (Finistère), René, baron de Penmarc’h (1584-1632), dont Vincent de Penmarc’h :

Vincent, septième baron de Penmarc’h, naquit en 1611 et succéda en janvier 1638 à son frère René. Il était déjà chevalier de l’ordre du Roi, lorsqu’il épousa, le 7 août suivant, Anne Gillette Rivoalen, fille du seigneur de Mesléan et de Marguerite Barbier de Kerjean. Il en eut : 1° Anne-Louise-Gabrielle, qui épousa François du Poulpry, 2° Françoise-Gabrielle, qui épousa Louis du Louët. 3° Enfin Vincent-Gabriel, qui devait lui succéder. Comme ses deux prédécesseurs, Vincent semble avoir mené une existence de propriétaire terrien, partageant, échangeant, vendant ses biens ou s’occupant de l’établissement de ses enfants. En dehors des aveux, des baux ou des quittances, nous ne trouvons en effet que des actes d’état-civil : naissance et baptême des enfants, testament de Jeanne de Sansay (qui lègue son corps à Plouigneau, en Tréguier et son cœur à l’église de Saint-Frégant), mariage de ses sœurs et frères, ou des pièces relatives à ses droits féodaux : droit de menée (pourtant en désuétude), foires et marchés de Goulven. C’est également lui qui fit couler la cloche du château qui devait n’être refondue qu’au XIXe siècle par l’abbé Le Poulzot. Il mourut le 10 mars 1666 et fut inhumé à Saint-Frégant. (L. Farcy, \ »Les seigneurs de Penmarc’h en Saint-Frégant\ », dans Bulletin de la Société archéologique du Finistère, LVII, 1930, p. 76-77).


Blason de Jean de Sanzay


Devise de la maison de Sanzay

Note
(1) La Magnanne. Pilleur de la Cornouaille pendant les Guerres de la Ligue.
Penmarc’h (de) – Réformation de la noblesse (1669) en ligne sur Tudchentil
Armoiries et sceaux des Penmarch (B. Yeurch)
Généalogie par Missirien (H. Torchet)


Parties anciennes du château des Penmarc’h à Saint-Frégant (Finistère)

29 Mai 2015
Jean-Luc Deuffic

Publication : IMAGENS E LITURGIA NA IDADE MÉDIA

Parution au 30 mai 2015 :

\ »IMAGENS E LITURGIA NA IDADE MÉDIA\ » – Coord. Carla Varela Fernandes. Imagens e Liturgia na Idade Média. Lisboa: Secretariado Nacional para os Bens Culturais da Igreja, 2015. Col. Bens Culturais da Igreja, Nº 4.

Apresentação
Carla Varela Fernandes
Uma colecção de escultura para uma arquitectura perdida: o núcleo altimedieval de Sines
Paulo Almeida Fernandes
Gesto, imagen y liturgia: las representaciones de dolor y lamento en la escultura funeraria portuguesa (siglos XII-XIV)
Alícia Miguélez Cavero
El Apóstol está presente: la estatua de Santiago y sus peregrinos en el siglo XIII
Manuel Castiñeiras González
Uma imagem de S. Bartolomeu do MNAA: questões em torno da estética, iconografia e importância do culto nos anos do Românico
Carla Varela Fernandes e Mário Jorge Barroca
L’iconographie du travail et la culture de l’alimentation: élaborations figuratives dans la production enluminée liturgique de Émilie-Romagne au XIIe siècle
Maria Alessandra Bilotta
Questões em torno dos Ordinários do Oficio Divino de Alcobaça
Catarina Fernandes Barreira
L’image monumentale et le texte: remarques sur la mécanique épigraphique à la fin du Moyen Âge
Jean-Marie Guillouët
A nova museografia da escultura portuguesa no Museu Nacional de Arte Antiga
Maria João Vilhena de Carvalho e Anísio Franco

Site de présentation

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