30 Août 2007
Jean-Luc Deuffic

Mots de bibliophile … : Richard de Bury (1287-1345)

\ »Nous pensons qu’il est avantageux d’entretenir les étudiants sur les diverses négligences qu’ils pourraient toujours facilement éviter, et qui nuisent considérablement aux livres. D’abord qu’ils mettent une sage mesure, en ouvrant ou en fermant les livres, afin que la lecture terminée, ils ne les rompent pas par une précipitation inconsidérée, et qu’ils ne les quittent point avant de remettre le fermoir qui leur est dû. Car il convient de conserver avec plus de soin un livre qu’un soulier.
Vous verrez peut-être un jeune écervelé, flânant nonchalamment à l’étude, et tandis qu’il est transi par le froid de l’hiver, et que comprimé par la gelée son nez humide dégoutte, ne pas daigner s’essuyer avec son mouchoir avant d’avoir humecté de sa morve honteuse le livre qui est au-dessous de lui… Il a un ongle de géant, parfumé d’une odeur puante, avec lequel il marque l’endroit d’un plaisant passage. Il distribue, à différentes places, une quantité considérable de fétus avec les bouts en vue, de manière à ce que la paille lui rappelle ce que sa mémoire ne peut retenir. Ces fétus de paille que personne ne retire, font sortir d’abord le livre de ses joints habituels, et ensuite, finissent par se pourrir. Il n’est pas honteux de manger du fruit et du fromage sur son livre ouvert et de promener mollement son verre tantôt sur une page tantôt sur une autre.
Il y a aussi des jeunes gens impudents auxquels on devrait défendre spécialement de toucher aux livres, et qui, lorsqu’ils ont appris à faire des lettres ornées, commencent vite à devenir les glossateurs des magnifiques volumes que l’on veut bien leur communiquer, et où se voyait autrefois une grande marge autour du texte on aperçoit un monstrueux alphabet ou tout autre frivolité qui se présente à leur imagination et que leur pinceau cynique a la hardiesse de reproduire… Et c’est ainsi que nous voyons très fréquemment les plus beaux manuscrits perdre de leur valeur et de leur utilité.
Que désormais les laïcs, qui regardent indifféremment un livre renversé comme s’il était ouvert par eux dans son sens naturel, soient complètement indignes de tout commerce avec les livres. Que le clerc couvert de cendres, tout puant de son pot au feu, ait soin de ne pas toucher, sans s’être lavé, aux feuillets des livres; mais que celui qui vit sans tache ait la garde des livres précieux.\ »

Richard de Bury, Philobiblon. Tractatus pulcherrimus de amore librorum, rédigé vers 1343-1345, éd. et trad. Hippolyte Cocheris, 1856.

30 Août 2007
Jean-Luc Deuffic

Tabularia

La revue Tabularia. Sources écrites de la Normandie médiévale est une revue électronique librement accessible sur le site du CRAHM qu’héberge le réseau de l’Université de Caen.


Tabularia se donne pour objectif l’étude des sources écrites médiévales de la Normandie. Elle est conçue pour permettre une diffusion rapide de l’information sur ce thème. La revue entend également promouvoir le débat à partir des dossiers proposés en permettant les échanges entre les lecteurs et les auteurs. Elle accorde enfin une large place à la diffusion et à la publication de sources documentaires écrites, inédites ou non. La validité de l’information scientifique est assurée par l’existence d’un comité de rédaction et une double lecture des contributions proposées.

Parmi les derniers articles parus, à signaler l’étude érudite de  S. Lecouteux : Sur la dispersion de la bibliothèque bénédictine… [xml] [pdf]

Site [En ligne]

29 Août 2007
Jean-Luc Deuffic

Professor Richard Sharpe

Le professeur Richard Sharpe (British Academy) qui enseigne la diplomatique donne à voir sur le site de la Faculty of History de l’Université d’Oxford ses précieux travaux relatifs aux manuscrits médiévaux des bibliothèques anglaises.
 
La mise en ligne de son inventaire British Medieval Library Catalogues reste pour les médiévistes un instrument de travail incontournable pour l’étude des manuscrits et des bibliothèques anglaises au Moyen Age. On lira également avec beaucoup d’intérêt Le bibliothécaire médiéval et son héritage, conférence donnée à la Sorbonne le 18 septembre 2003. Dans l’impressionante liste des publications de Richard Sharpe nombre d’études font référence aux manuscrits médiévaux.
[En ligne]

Bibliographie sélective de Richard Sharpe
[En ligne]

29 Août 2007
Jean-Luc Deuffic

La lettre volée : le manuscrit 193 de la bibliothèque de Vendome

Pour une approche directe du livre médiéval quoi de plus instructive que cette enquête sur le manuscrit 193 de la bibliothèque de Vendôme instrumentée par l’ IRHT: codicologie, décoration, reliure, histoire du manuscrit … Véritable support de valorisation des recherches menées à l’IRHT autour du manuscrit médiéval, c’est également un outil pédagogique et une publication électronique scientifique.

Le manuscrit 193 de la Bibliothèque municipale de Vendôme a été copié au XIIe siècle sur parchemin. Il compte aujourd’hui 97 feuillets (210 x 120 mm). Écrit avec soin, à raison de 24 ou 25 longues lignes par page, des mains d’une douzaine de scribes différents, il comporte une unique miniature, représentant en pleine page l’abbé Geoffroy agenouillé devant le Christ, tandis que lettres ornées et initiales rubriquées scandent les parties du recueil et des textes. Trois feuillets manquent entre les feuillets actuellement numérotés 94 et 95. La reliure, en mouton mégissé jaunâtre sur ais de chêne, date du premier quart du XVIe siècle, mais on relève des traces d’une reliure antérieure.

Le manuscrit contient les œuvres plus nettement doctrinales de Geoffroy de Vendôme : cinq traités, treize sermons, douze lettres, trois prières en prose et deux versifiées. Il a certainement été réalisé, pour l’essentiel, entre 1129 et 1132 sous la direction de l’auteur lui-même, abbé de la Sainte-Trinité de 1093 à 1132, et scrupuleusement révisé par ses soins.

L’ouvrage semble n’avoir jamais quitté la bibliothèque de l’abbaye, dont il comporte un ex-libris du XVIIe siècle et un autre du XVIIIe, assorti de la cote C. 193. Il passe ensuite à la Bibliothèque municipale, constituée en grande partie des manuscrits de l’ancienne abbaye.

Pour cette remarquable initiative voir au site de l’Institut de Recherche et d’Histoire des Textes (IRHT) :

Jacques Dalarun (dir.), La lettre volée. Le manuscrit 193 de la Bibliothèque municipale de Vendôme, Paris, site web de l’IRHT, 2003 (Ædilis, publications scientifiques, 1) [En ligne]