Prigent Calvarin, imprimeur breton à Paris (ca 1518-1560)
A voir, une liste de ses productions typographiques : [ Lien ]
Parva naturalia – De Sensu et sensato. De Memoria et reminiscentia. De Somno et vigilia. De Insomniis. De Longitutide et brevitate vitae. De Juventute et senectute. De Respiratione. De Vita et morte . Paris, 1535. Exemplaire de la Bibliothèque Desguine, Archives départementales des Hauts-de-Seine.
Jean-Emmanuel de Rieux, marquis d’Assérac († 1657) : un lettré « bien versé dans les sciences » …
Ma rencontre avec le marquis s’est produite récemment lorsque travaillant à la recherche d’informations pertinentes sur plusieurs bibliophiles bretons du XVIIe siècle, je me suis rendu compte de l’importance du fonds des livres du seigneur d’Assérac conservé par la prestigieuse Bibliothèque Sainte-Geneviève, à Paris. Du reste, son érudit conservateur du département de la Réserve, Yann Sordet, m’a aimablement invité à faire part de mes découvertes dans la revue Histoire et civilisation du livre, ce que je ferai avec grand plaisir…
Le Père Louis Jacob, dans son Traicté des plus belles bibliothèques publiques et particulières, qui ont esté, et qui sont à présent dans le monde (Paris, 1644, seconde partie, p. 642), citant pour la Bretagne celle de « Jean de Rieux, marquis d’Asserac », écrit de lui qu’il « est bien versé dans les sciences, qu’il cultive journellement par le moyen de bons livres, dont il a rempli son exquise bibliothèque, pour l’augmentation de laquelle il travaille avec un grand soin ».
Je ne sais si Jean-Emmanuel de Rieux fut véritablement un « bibliophile » tel qu’on peut le concevoir aujourd’hui. Le marquis avait certainement un impressionnante bibliothèque mais c’était essentiellement une bibliothèque d’étude, celle d’un lettré passionné par les sciences, notamment par l’astrologie et l’astronomie. Mais laissons s’exprimer Paul Jacob dans l’épitre dédicatoire de son ouvrage, La clavicule, ou la science de Raymond Lulle (Paris, Jean Rémy, 1647), qu’il adressa au marquis, son mécène :
A Monseigneur le Marquis d’Asserac
Monseigneur,
L’amour que vous avez naturellement pour la Science, & pour la Vertu, me donne la hardiesse de vous offrir cet Ouvrage, comme le Chef-d’euvre du plus Vertueux & du plus // Esclairé de tous les Hommes. C’est Raymond-Lulle, Monseigneur, que vous retirez miraculeusement du Tombeau, apres plus de quatre cents ans, & qui vient en France acquerir une seconde gloire, si vous luy permettez que son Nom vive avec le vostre. C’est de l’Illustre famille de Rieux, dont la memoire ne scauroit mourir, qu’il peut infailliblement acquerir l’immortalité qu’il a meritée. Aussi tous les Esprits qui tiennent des qualitez du vostre, l’ont tousjours estimé, & son Nom est en telle veneration parmy les Doctes, qu’ils le regardent comme un Prodige de la Nature, & un Miracle de leur Siècle. Il espere de vostre Bonté, que vous souffrirez son entretien ; & il vous estime trop genereux, pour ne s’asseurer pas de vostre protection, apres avoir surmonté // par sa Vie, & par ses Miracles, tout ce qui faisoit obstacle à sa Probité.
A qui pouvois-je mieux addresser la Vertu que j’ay choisie pour Idée, qu’à celuy qui est le Temple vivant de toutes les Vertus ensemble ? En effet, Monseigneur, y eut-il jamais Grandeur qui leur fût plus propice que la vostre ? Et toutes les fois qu’elles recourent à vous, n’y treuvent-elles pas un Azile favorable ? C’est estre digne Imitateur de tant de Heros, dont vous descendez ; Et vous relevez encore par l’esclat de vos belles Actions la gloire de tant d’Admiraux, de Mareschaux de France, & de Generaux d’Armée de vostre Illustre Famille. Ce n’est pas la seule Noblesse de vostre Maison, qui vous fais estimer ; Elle est accompagnée des plus hautes Perfections dont une Ame puisse estre embelie ; & de quelques // graces que vous soyez redevable au sang dont vous tirez vostre origine ; on remarque aysément que les avantages que vous possedez, sont plustôt des effets de vostre Esprit, que des presens de la Nature. Toutes vos richesses ne sont pas estrangeres ; vous possedez en vous mesme des Thresors bien plus grands ; & la gloire que vous tenez de vos Ayeux, ne diminüe point celle que vos Vertus vous ont acquise. Cette vivacité d’Esprit, ce Jugement si profond, & cette Memoire qui recele tant de belles lumieres pour l’Histoire, pour la Poësie, pour les Langues, & pour les Sciences les moins vulgaires, sont des qualités bien plus nobles, & dont vous estes seulement redevable à vostre Sagesse. Cette affabilité, & cette douceur qu’on decouvre sur vostre visage, vous gagnent en mesme temps les cœurs & les // affections de ceux qui ont le bonheur de vous approcher. Aussi n’estes vous pas seulement doüé des Vertus Intelectueles ; vous avez encore les Morales, & les Surnaturelles. Vous recevez en vostre Maison beaucoup de Vertus, que la pluspart des Grands rejettent de leur Cour ; & vous monstrez par là, que vous avez seul ce qu’ils n’ont pas tous ensemble. La passion que vous avez pour les Muses, ne diminüe point celle des Armes ; & c’est une merveille qui tient lieu de Prodige au siecle où nous sommes, de ce que vous maintenez la gloire des Lettres parmy les Triomphes de la Guerre. Vous cultivez avec soin les deux principaux Exercices, qui contribüent le plus à la gloire des grands Empires ; & vous avez si bien reconcilié les Armes avec les Lettres, que le Nom de Sçavant & de grand (ã iiij) // Capitaine s’accordent parfaitement bien en vostre Personne. Puisque c’est une verité reconnüe de tous les Honestes gens, il me sieroit mal de la vouloir publier ; outre que mes paroles n’adjousteroient rien à vostre Gloire, & le Tableau que j’en ébaucherois seroit tres-imparfait. Il n’y a que vous, Monseigneur, qui le pouvés achever, & dont la main, comme celle de Cesar, peut desfaire nos Ennemis, & décrire vos Victoires.
Que n’ay-je le Genie du Poëte Lyrique ! Je publierois que ce second Mecene, que Raymond-Lulle a choisi pour Protecteur, n’a pas moins de bonne volonté pour les Lettres, que le premier, dont il a si dignement celebré la gloire. Je ferois voir comme un autre Virgile, que l’Auguste Famille d’Asserac est la seule qui descend de ces grands Prin- //ces de Troye, également recommandables pour les Armes & pour les Lettres, ainsi qu’il le décrit luy-mesme quand il dit, Assaracique Domus, &c. Touché de ses hauts sentimens, & inspiré des beaux feux de sa Poësie, je loüerois cette ancienne Race d’Asserac, qui compte tant de Siecles & tant de Heros parmy ses Ancestres ; Et il me seroit bien aysé de prouver qu’il s’en escoulera une infinité d’autres, avant que de produire un second vous-mesme en Vertus, en Valeur, & en Doctrine. Mais je sçay, Monseigneur, que vous aimez beaucoup mieux vous rendre recommandable par vostre propre Vertu, que par les foibles ornemens de ma plume. Quoy qu’il en soit, cette Traduction, & ces Fleurs de Rhetorique, peuvent apporter du // proffit aux Esprits, qui n’ont pas l’Intelligence des Langues, & qui ne sont pas dans le mesme degré de Science où vous estes. Recevez donc, Monseigneur, ce Livre fameux, que Raymond-Lulle a l’honneur de vous offrir par mes mains : Ne luy refusez pas une place dans cette belle Bibliothèque dont vous estes l’Ame vivante ; & que j’appelle à bon droit l’ornement, ou plustot l’ornement de vostre Province. S’il peut meriter vostre Approbation, je me vanteray par tout, qu’il aura receu chez vous un bonheur qui doit faire la meilleure partie de son estime. Que si vous agréez que je tire de la splendeur de vostre Nom, le plus durable Ornement de mes Ouvrages, j’essayeray de m’eslever à de plus hautes sciences, qui ne seront ny moins // belles, ny moins utiles, afin de meriter avec plus de Justice la qualité glorieuse
Monseigneur,
De
Vostre tre-humble / tres-obeissant, & tres-/ fidele serviteur
P. Iacob.
Cette dédicace quelque peu pompeuse, qui n’échappe pas à la loi du genre, nous révèle toute l’attitude du marquis envers les Sciences en général, et l’étude de sa bibliothèque, déjà amorcée (une centaine d’ouvrages a été identifiée), ne déroge pas à cette première constatation. Au reste, les relations du marquis d’Assérac avec le philosophe italien Tomasso Campanella (1568-1639) qu’il rencontra en 1636 à Paris, puis plus tard avec le capucin Yves de Paris (v. 1590-1678), ou avec l’historien Eudes de Mézeray (1610-1683, qui entreprit pour lui une traduction du Policraticus de Jean de Salisbury) confirment le fait que notre Breton gardait pour elles une certaine passion.
Nous sommes certains d’autre-part que les collections du marquis d’Asserac contenaient des manuscrits, plusieurs de luxe. Nous citerons comme exemple le Diodore de Sicile, exécuté pour François Ier, conservé à la bibliothèque du Musée Condé de Chantilly (ms 721). dont le frontispice, peint par Jean Clouet, a fait l’objet d’une étude de Cécile Scaillierez (Revue du Louvre, 4/1996, p. 47-52).
Un manuscrit des oeuvres de Petrarque, aujourd’hui à Munich (Ital. 81) nous dévoile son intérêt pour l’humaniste et poète italien dont il possédait aussi une édition de 1554 achetée à Rome le 19 août 1629.
La signature reconnaissable du marquis d’Assérac J: Em de Rieux
Frontispice des « troys premiers livres de Diodore Sicilien, historiographe grec, Des antiquitez d’Egipte, et autres païs d’Asie et d’Afrique. Translatez de latin en françoys par Maistre Anthoine Macault, notaire, secrétaire et valet de chambre ordinaire du roy ». Chantilly, Musée Condé, ms 721.
(c) RMN / René-Gabriel Ojéda
(c) Munchen, Bayerische Staatsbibliothek 620 (Ital. 81), f. 105. Francisco Petrarcha, Frammenti (sonneti, Canzoni), Triumphi, Psalmi.
La vie du marquis d’Assérac, mort en duel en 1657, reste encore a écrire … Nous nous attelons à cette tâche. Personnage énigmatique, sa seconde femme (et cousine), Jeanne-Pélagie de Rieux, n’échappe pas à cette image trouble que nous laissent sur le couple certains témoignages. Cette femme d’une superbe beauté, qui avait pour anagramme « J’égale une Diane en prix » fut à son époque des plus controversée. On peut encore admirer dans le sublime recueil de devises de la Bibliothèque de l’Arsenal (Res. 5217, f. 35, ci-dessous) ses armes et sa devise italienne : Perche preda non vuole.
Voir sur l’excellente base des reliures estampées à froid de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, deux ouvrages ayant appartenu aux collections du marquis d\ »Assérac :
§ ANDRELINI (Publio Fausto), De Neapolitana Fornoviensique victoria, Paris, Guy Marchant pour Jean Petit, 31 VIII 1496 (4° Y 373(1) INV 444 RES)
§ PLACUS (Andreas), Lexicon biblicum, Cologne, Melchior Von Neuss, 1536 (FOL B 588 INV 712 RES)
René de Chasteaubriant (+ ca 1500), chevalier pèlerin pour la Terre Sainte, comte de Guazava au royaume de Fez
Fils de Theaude de Châteaubriant, seigneur du Lyon d’Angers, des Roches-Baritaud, comte de Casan au royaume de Naples (+ 1470) et de Françoise Odart, dame de Colombières en Touraine et baronne de Loigny dans le Perche, René de Châteaubriant fut conseiller et chabellan du roi. Il descendait de cette lignée du Lyon d’Angers qui eut « pour service militaire le comté de Casan au royaume de Naples ; elle fonda une principauté en lllyrie ; elle s’allia deux fois avec la maison de Maillé, trois fois avec celle de Sainte-Maure-Montausier » (Mémoires d’Outre-tombe).
Dès le 5 juin 1492, il porte les titres de baron de Logné (Loigny), de vicomte de Regmalart et de seigneur des Roches-Baritaud, de Chavannes et du Lyon d’Angers (Archives du château de la Potherie, XXXII, f. 246). Après la mort de Jacques de Châteaubriant, peu avant 1500, il entra en possession de la châtellenie de Challain, dont la nue-propriété paraît lui avoir été assurée dès 1480. Sa fortune fut divisée entre ses filles, exceptée la seigneurie de la Roche-Baritaud qui advint à son frère cadet, Georges (Comte René de l’Esperonnière, Histoire de la baronnie de Candé, Angers, 1894, f. 426-427).
René de Châteaubriant est attesté comme propriétaire du château de Saint Hilaire des Noyers, situé à Colonard Corubert, dans le Perche ornais, propriété actuelle du professeur Pierre Braquet [ lien ]. L’acte de présentation de Simon Regnault à la cure, daté du 4 mars 1499, précise que le droit de patronage lui appartient « à cause de sa terre et seigneurie du dit lieu et dépendances » (Société historique et archéologique de l’Orne, XXVI, 1907, p. 89).
Sur un ancien armorial de Mons (Belgique) relatif aux familles alliées des Croy figuraient les armes de René de Châteaubriant et de sa femme Hélène d’Estouteville :
« Le blason du mari porte de gueules semé de fleurs de lis d’or. Celui de l’épouse est burelé d’argent et de gueules ; un lion de sable, armé, lampassé et couronné d’or brochant sur le tout.
René de Châteaubriant, comte de Casan, baron de Loigny, vicomte de Regmalart, seigneur du Lion d’Angers, qui vivait en 1489, et sa femme, Hélène d’Estouteville, dame de Tronchai, fille de Robert, baron d’Ivry, et d’Ambroise de Lorré), furent le père et la mère de Charlotte de Châteaubriant. Le placement de ce second groupe près du précédent, est justifié par le mariage de Henri de Croy (fils de Philippe de Croy et de Jacqueline de Luxembourg) avec Charlotte de Châteaubriant. De cette union naquirent cinq fils :
1° Philippe de Croy, né en 1496 et mort à Bruxelles en avril 1549, premier duc d’Arschot et héritier d’une grande partie des biens de son oncle, Guillaume de Croy, dit Monsieur de Chièvres, précepteur de Charles-Quint
2° Guillaume de Croy, cardinal-archevêque de Tolède et chancelier de Castille, mort à Worms, le 6 janvier 1521 et inhumé au cloître des Célestins d’Héverlé : son corps et son mausolée ont été transférés en 1842 dans l’église des Capucins, à Enghien (Ernest Matthieu, Histoire d’Enghien, p. 564) ;
3° Charles de Croy, époux de Françoise d’Ambroise ;
4° Robert de Croy, évèque de Cambrai, mort en 1556 :
5° Charles de Croy, abbé d’Afflighem, de Saint-Ghislain et d’Hautmont, puis évêque de Tournai, mort à Saint-Ghislain, le 2 décembre 1564.
Charlotte de Châteaubriant mourut en 1509 et Henri de Croy en 1514.
Les huit quartiers de René de Châteaubriant sont :
Quartiers paternels : Châteaubriant, Laval, Lion d’Angers et Clisson (Rietstap, Armorial, p. 240, 622 et 254)
Quartiers maternels : Oudart, Craon, Loigny et Rohan. (Ib., p. 780, 279, 869 et 891)
Les huit quartiers de Hélène d’Estouteville sont :
Quartiers paternels : Estouteville, Blainville, Fiennes et Mailli. (Ib, p. 354, 372 et 669. La Chenaye Desbois, Dict. de la noblesse de France, t. II, p. 354)
Quartiers maternels : Lorré, Grandpret, Ivry et Ailly. (Rietstap, p. 447, 547 et 35)
Source : « Armoiries de familles alliées aux Croy, copiées au XVIIIe siècle à l’hôtel de ville de Mons », dans Annales du Cercle archéologique de Mons, XXIII, 1892, p. 19-20.
La Chenaye Desbois, Dictionnaire de la noblesse de France. Paris. 1771, 2e édition, t. iv, p. 288 à 291.
René de Châteaubriant et Hélène d’Estouteville eurent en plus de Charlotte, deux autres filles :
– Marie, dame du Lyon d’Angers, mariée à Jean de Chambres (1), seigneur de Montsoreau
– Madeleine, dame de Chavannes, qui épousa François, seigneur de la Noue (2)
La carrière de René de Châteaubriant n’est pas très connue… faute de documentation. Quelques titres dans les archives du château de Beaumont (Belgique) font état d’une « Lettre d’invitation du roi Dom Philippe de Castille à M. René de Châteaubriant, seigneur du Lion d’Angers, pour l’engager à venir signaler sa vaillance dans la guerre sainte qu’il faisait aux Maures de Grenade et de Cordoue, le 12 juin 1490 ; avec la copie d’une très-élégante réponse latine, datée de Paris le 8 mars 1491 » (Commission royale d’histoire, Académie royale de Belgique, II, 1838, p. 270).
Ses armes (de gueules, semé de fleurs de lys d’or), accompagnées du collier de l’Ordre de Saint-Michel, se retrouvent sur un exemplaire du Livre de l’Ordre de Chevalerie de Raymond Lull [ lien ], aujourd’hui conservé à la Bibliothèque municipale de Toulouse (ms 830) : « Cy commence le livre de l’ordre de chevalerie ». Prologue : « A la louenge et gloire domne Dieu, qui est sire et roy souverain par dessus toutes choses celestes et terrestres, nous commençons cest livre de l’ordre de chevalerie pour demonstrer que à la segnifiance … ».
(c) Toulouse BM 830. Frontispice. Source : Base Enluminures
René de Châteaubriant figure également dans la « Relation d’un voyage en terre sainte, au mont Sinaï et au couvent de Sainte-Catherine » qu’il effectua vers 1486 avec un groupe de pèlerins parmi lesquels figuraient deux autres Bretons : François de Tournemine, et l’abbé de Saint-Méen, Robert de Coëtlogon. Le récit anonyme de ce périple se trouve transcrit dans un manuscrit de la Bibliothèque municipale de Rennes (ms 261), du XVe s., manuscrit qui comporte deux feuillets d’un livre de raison tenu par Jean Bouscher, sieur des Planches, en Bruz, près de Rennes (Trésor des bibliothèques de Bretagne, Pontivy, 1989, p. 72, n° 26 – Abbé Guillotin de Corson, « Note sur la relation d’un voyage en Terre-Sainte fait par trois Bretons à la fin du XVe siècle », dans Bulletin et mémoires de la Société archéologique du département d’Ille-et-Vilaine, XXXIII, 1904, p. 395-398) .
Mon ami André-Yves Bourgès me signale que ce texte a fait l’objet de deux éditions récentes et relativement accessibles : en 1979 dans Archivum Franciscanum Historicum, t. 72, p. 106-133 et 330-428 (B. Dansette, « Les pèlerinages occidentaux en Terre Sainte : une pratique de la \ »Dévotion moderne » à la fin du Moyen Âge? Relation inédite d’un pèlerinage effectué en 1486″) et en 1997 dans D. Régnier-Bohler, Croisades et pèlerinages. Récits, chroniques et voyages en Terre Sainte (XIIe-XIVe siècle), p. 1168-1225.
De même, on trouvera sur le manuscrit de Rennes une notice et un fac-similé du f. 63v dans Voyage au pays des croisades, d’Anne Pouget-Tolu et Wilfrid Lermenier, Paris, L’Harmattan, 1999, p. 134.
Le Voyage de Georges Lengherand, mayeur de Mons en Haynaut, a Venise, Rome, Jerusalem, Mont Sinaï, Le Kayre, en 1485/1486 mentionne la présence de » Franchois de Tournemine, sgr de la Gherche, escuier d’escuyrie du duc de Bretaigne »… (A) Je ne sais s’il y a relation entre ces deux récits.
Un autre aspect méconnu de la biographie de René de Châteaubriant reste sa nomination, le 11 août 1493, par D. João II, roi du Portugal (1455-1495, dit le Prince parfait), au titre de comte (in partibus infedelium) de Guazava, au royaume de Fez. Voir Pierre de Cenival, « René de Chateaubriand, comte de Guazava au royaume de Fez, 1493 », dans Hespéris, XIX, 1934, p. 27-37. Jean Aubin, « D. Joao II devant sa succession », dans Arquivos do Centro Cultural Português, 27, 1990, p. 101-140 (118-121)
(1) Alliée aux Rohan, aux Craon, aux d’Estouteville, la maison de Chambes était comptée parmi les plus considérables de l’Angoumois. Le 1er février 1518, Charles de Boulainvilliers, comte de Rossillon, vte hérédital d’Aumale, seigneur de Rouvran, de Verneuil-sur-Oise, et sa femme, dame de Coudroy et Montpensier, font la foi et hommage lige, pour « le chastel, chastellenie, terre et seigneurie du Couldroy » à « Marie de Chasteaubriand, dame de la baronnie de Champfroy et des seigneuries du Lyon d’Angers, Challun et Verrières ». veuve de Jean de Chambes, seigneur de Montsoreau et du Petit-Chasteau, au nom et comme ayant la garde-noble des enffans myneurs du défunt » (Mémoires de la Société archéologique de Touraine : Série in-8°, Volume 40, p. 191) . De ce mariage :
1) Philippe de Chambes x Anne de Laval.
2) Hippolyte, née vers 1497 X (1526) Jacques d’Amboise, chevalier, baron d’Aubujoux (Auvergne), et de Castelnau (proche d’Albi). Postérité.
3) Louise, née vers 1500, X (1529) Jean de Malestroit.
(2) Jean-François de La Noüe, seigneur de La Noüe, Guémené, Toulan, Basoges, Launay-Basoin, Le Bois-Greffier, Lesemeuc, La Porte-Bernier et La Bouexière, qualifié en 1481 noble écuyer puis noble et puissant seigneur, reçut en cette année un aveu comme seigneur de Guémené. Il se distingua dans le guerres d’Italie. Testament : Nantes, 26 juillet 1537. Inhumé à Notre-Dame de Fresnay, près de son père. Décède vers 1547 (Source : Précis généalogique de la maison de La Noüe, p. 66-67). Il est le grand-père du célèbre « Bras-de-Fer » … François de La Noüe.
(A) FrançoisTournemine, Sire de La Guerche, fut nommé par Louis XII, ambassadeur de Hongrie en 1500, « pour y conduire la princesse Anne de Foix, fille du comte de Candale & épouse de Ladislas, roi de Pologne, de Hongrie & de Bohême, s’aquittant de cette ambassade avec magnificence & dextérité, fit assigner le Douaire de la Reine sur le Domaine de Hongrie, porta le sceptre royal au couronnement, se signala dans plusieurs expéditions contre les Turcs, & après avoir fait deux fois le voyage de la Terre – Sainte, mourut l’an 1529, sans avoir été marié » (Moreri, Le grand dictionnaire historique, p. 189).
Illustration : Saint-Méen-le-Grand, église abbatiale, pierre tombale de Robert de Coëtlogon (+ 30 avril 1492), compagnon de route de René de Châteaubriant. Armes des Coëtlogon : de gueules à trois écussons d’hermine.
Les Heures de Gilles de La Helandière et de Gabrielle de Beauvais : New York Public Library MA 42
(c) New York, Public Library MA 042, f. 23
Toujours à la recherche de manuscrits issus de Bretagne, Digital Scriptorium, la base bien connue, vient de nous livrer un nouveau Livre d’heures ayant appartenu à un couple de Bretons : Gilles de La Helandière et Gabrielle de Beauvais, actuellement conservé à la Public Library de New York (MA 042)
Le Nobiliaire de P. de Courcy fait effectivement mention d’une famille de ce nom, seigneur dudit lieu et de Maltouche, paroisse de Tremblay ; de Beauvais, paroisse de Servon, déboutée à la Réformation de 1671 (Ressort de Rennes) et portant pour armes : D’argent à la bande de gueules chargée de 3 fleurs de lys d’or (Nobiliaire de Bretagne, II, p. 19).
Sur ce couple je n’ai retrouvé que l’information précieuse donnée par les Archives d’Ille-et-Vilaine (9 G 46; 1 H 5) et transmise par le Pouillé historique de l’archevêché de Rennes, de l’abbé Guillotin de Corson : le 12 janvier 1647, Gabrielle de Beauvais, veuve de Gilles de la Hellandière, sieur de Saint-Denis, fonda trois messes en l’église de Servon et donna les terres de la Grande et de la Petite-Bretonnière, valant 60 livres de rente, au chapelain chargé de les desservir ; celui-ci devait, en outre, fournir le pain bénit le jour des Rois.
L’abbé Paul Paris-Jallobert, dans ses Anciens registres paroissiaux de Bretagne (pour \ »Servon\ », Rennes, 1895, p. 8-9) fait aussi mention du couple , et cite deux enfants : Renaud, né le 11 novembre 1601, et Charles, né le 27 avril 1603, nommé en 1631 \ »sieur de la chapelle\ ». Renaud, sieur de Beauvais, fut sénéchal du Gué, et se maria, à Landravan, le 26 novembre 1624 (?) à Marie Nicole, dame de la Chochonnais, meurt le 4 février 1670.
De la famille de Beauvais était issu Noble homme écuyer Amaury, sieur de la Rivière, Villalée, la Chesnay, le Fail, la Saigerfe, la Chaisne, attesté à la fin du XVIe s. Gabrielle de Beauvais avait \ »nommée\ » le 2 juillet 1629 une Gabrielle, fille de Jacques de Montalambert et de Fraçoise de La Hellandière (Paris-Jallobert, \ »Québriac\ », Rennes, 1891, p. 9
Le moulin à papier de la Helandière (en Tremblay), sur la rive gauche de la Loisance, dont l’activité est attestée depuis 1655 à l’époque de René de La Helandière, a été étudié par Jacques Duval, dans ses Moulins à papiers de Bretagne, L’Harmattan, 2005, p. 135sq.
On trouvera sur le site Digital Scriptorium une description et quelques images du Livre d’heures donné comme étant à l’usage de Coutances (??).
La reliure y est datée de 1550 et porte les noms des deux époux : \ »E (pour écuyer?) : Gilles de la Helandiere\ » et D : Gabrielle de Beauvais\ ». Provenance : Catalogue Robert L. Stuart, New York 1884, p. 74.
Sur la feuille de garde : \ »Ces Heures Manuscrites sont très curieuses; elles contiennent 1072 lettres majuscules en or, sur lesquelles il y a 173 lettres enluminées. Ce grand nombre de lettres rend très précieuse et très cher ce manuscrit\ ».
En 1873, le manuscrit est inscrit au Catalogue de livres anciens et modernes, rares et curieux de la Librairie Auguste Fontaine (n° 8788) :
Livre d’heures manuscrit du quinzième siècle, de 149 feuillets, orné de cinq grandes miniatures avec enluminures, neuf pages enluminées, avec de grandes lettres, et de nombreuses lettres avec fleurs et or bruni, sur les marges. Ce manuscrit, d’une écriture fort belle et régulière, est précédé d’un calendrier dont quelques saints et saintes sont particuliers aux provinces de Normandie et de Touraine. C’est un manuscrit de famille, qui a appartenu à Gilles de la Helandière, et à Gabrielle de Beauvais, son épouse, au commencement du dix septième siècle. Les miniatures représentent la sainte Vierge et sainte Anne, — le roi David à genoux devant Dieu le Père, qui lui apparaît, — le Christ en croix, — le Don des langues, — et un Prince frappé par la mort. Ce dernier sujet ne se trouve guère dans les manuscrits.
Le premier feuillet après le calendrier a été enlevé. A la fin du livre se trouvent douze feuillets d’un autre manuscrit, comprenant un calendrier et des prières, d’une écriture plus fine, à deux colonnes. En tête de chaque page du calendrier on remarque des légendes se rapportant aux travaux du mois : en janvier, poto, je bois; en février, ligna cremo, je brûle mon bois; en mars, de vite superflua demo, je taille la vigne; en avril, gramen gralum, agréable gazon ; en mai, mihi flos servit, la fleur m’est utile ; en juin, mihi pratum, je tiens mon pré; en juillet, fenum declino, je recueille le foin ; en août, messes meto, je coupe les moissons ; en septembre, vina propino, je bois le vin; en octobre, semen immi jacio, j’ensemence la terre; en novembre, mihi pasco sues, je fais paitre les porcs ; en décembre, mihi macto, je les tue.
Illustration : Visitation. (c) New York, Public Library MA 042, f. 23