16 Nov 2014
Jean-Luc Deuffic

Jean du Chastel, évêque de Carcassonne († 1475) : à propos d’un psautier et de sa « familia » bretonne


La cathédrale Saint-Michel de Carcassonne sur les remparts de la ville en 1462 [Gallica]

Roseline CLAERR
et moi-même, préparant un ouvrage sur les bibliothèques des DU CHASTEL et des COETIVY dans le contexte de la culture livresque bretonne à la fin du Moyen Âge, je me permets de publier cette trouvaille toute récente sur un membre de la familia de l’évêque de Carcassonne, Jean du Chastel.

Fils d’Olivier du Chastel (x 2 février 1408) et de Jeanne de Ploeuc, frère de Tanguy (IV) du Chastel, protonotaire apostolique, archevêque de Vienne (nommé en 1446), administrateur de l’évêché de Nîmes (21 novembre 1453), abbé de Saint-Léonard de Ferrières (ancien diocèse de Poitiers) (1454), évêque de Carcassonne (juillet 1456), Jean du Chastel décède le 15 septembre 1475 dans sa maison prévôtale de Toulouse, et est inhumé le 26 septembre suivant, en la cathédrale Saint-Michel de Carcassonne.

Dans un article récent (1) nous avions relevé les déboires de Tanguy du Chastel et de son frère Jean au sujet des reliques de saint Pelade, et donné une liste des manuscrits possédés par l’évêque de Carcassonne, dispersés entre Glasgow, Copenhague, Paris, Holkham Hall et Coimbra au Portugal, liste au demeurant incomplète mais qui montre une certaine \ »atomisation\ » européenne de la bibliothèque du prélat :

Copenhague, Bibliothèque royale
¤ Thott 359. Tancrède de Bologne, Roffredo de Bénévent, etc. XIVe s.  
¤ Gl. Kgl. S 197. Jean André, etc.. XIIIe s.  
¤ Gl. Kgl. S 198. Jean André, Gencellinus de Cassaneis, etc.  XIVe s. 
Glasgow, Bibliothèque Universitaire
¤ General 1125. Terence. Petrarque. XVe s.  
¤ General 1189. Terence. XVe s.  
Holkham Hall
¤ coll. Leicester 215. Grégoire XI. Décrétales.
Paris, Bibliothèque nationale de France
¤ Fr.. 6261. Histoire de l’ancien et du nouveau Testament en provençal. XVe s.   
¤ Lat. 8926.  Innocent IV, Commentaire sur les Décrétales ; Guillaume de Mandagout, De electionibus. XIVe s.
Coimbra, Biblioteca Geral da Universidade
¤ Coimbra BU 721. Jean de Imola. Commentaire sur les Décretales. 
¤ Coimbra BU 722 et 723. Dominique de Sancto Geminiano, Commentaire sur les Décrétales.   
¤ Coimbra BU 724. François de Zabarellis. Lecture sur les Décrétales.  
¤ Coimbra BU 725. Jean de Imola. Commentaire sur les Clémentines. XVe s.

Généralement, les manuscrits portent une inscription contemporaine se terminant par

« … a este de feu messire Jehan du Chastel euesque de Carcassonne. M. Bertaudi notaire ».


Ms. Coimbra 721. [Cliquer pour agrandir]

Poursuivant notre quête de manuscrits autour de l’évêque Jean du Chastel, un passage de la Chronique des évêques de Carcassonne (Chronicon episcoporum Carcassonis) de Gérard de Vic (1667) a retenu notre attention :

… uti legitur in libro Psalterii dato per Riochum Ledresnay canonicum proximae ecclesisae (Carcassensis) et vicarium generalem proximi episcopi …

extrait traduit deux siècles plus tard par Alphonse Mahul dans son Cartulaire de Carcassonne (1867) :

Le 26 le corps de Jean Du Chatel fut enseveli dans la cathédrale de Carcassonne proche le grand autel comme on lit dans le Psaultier donné par Roch Ledresnay chanoine de la cathédrale et vicaire général du susdit évêque …

Si ce psautier reste introuvable, le renseignement précieux donné par Gerard de Vic nous conduit vers une autre piste.  Dans notre dernier post nous avions fait allusion à la famille DU DRESNAY, une des plus importantes de Bretagne, au sujet d’un manuscrit de la Médiathèque des Ursulines de Quimper (ms. 1). Présentement, le psautier de Carcassonne provient d’un membre de cette famille (de la branche possessionnée à Carhaix, sans doute (2). L’auteur de la Chronique a bien relevé son nom : RIOCHUM LEDRESNAY. Bien évidemment, dans cette région de France saint ROCH reste très populaire ; c’est pourquoi A. Mahul l’a choisi au détriment de RIOC, un ermite breton, disciple de saint Guénolé, le fondateur de Landévennec (Finistère), certainement inconnu dans cette région du sud de la France (3)
Ainsi ce psautier dont l’existence est encore attesté en 1667 par Gerard de Vic, a été composé après 1475 puisqu’il inscrivait le décès de l’évêque Jean du Chastel. 

Quant à notre RIOC DU DRESNAY il semble avoir quitté ce monde avant 1484, date à laquelle un parent, HECTOR DU DRESNAY (cacographié HECTOR LADRENAY dans le Nécrologe de Birot) fonda deux obits pour la dotation desquels il fit don au chapitre de Carcassonne de 12 tasses d’argent pesant 15 marcs. Un de ces obits (20 février) était justement pour RIOC DU DRESNAY, chanoine et vicaire général de Jean du Chastel.
On remarquera que HECTOR est un prénom récurrent dans la lignée des seigneurs du Dresnay depuis le XIVe siècle au moins.

(1) J.-L. Deuffic, \ »L’évêque et le soldat. Jean et Tanguy (IV) du Chastel, à propos des reliques de saint Pelade … et de leurs manuscrits\ », dans Le pouvoir et la foi au Moyen Âge en Bretagne et dans l’Europe de l’Ouest (éd. Joëlle Quaghebeur, Sylvain Soleil). Mélanges in memoriam H. Guillotel, Rennes, PUR, 2010, p. 299-316. Sur les manuscrits de Tanguy du Chastel : Roseline Claerr, « Un couple de bibliophiles bretons du XVe siècle. Tanguy (IV) du Chastel et Jeanne Raguenel de Malestroit », dans Le Trémazan des Du Chastel. Du château fort à la ruine. Actes du colloque Brest, juin 2004, sous la direction scientifique d’Yves Coativy, Centre de Recherche Bretonne et Celtique (UBO/Brest) et Association Tremazan, Landunvez, 2006, p. 169-187.
(2) Dom Jehan du Dresnay était bailli de Cornouaille en 1476 ; Yves du Dresnay, chanoine de la cathédrale de Quimper de 1486 à 1497.
(3) La chapelle Saint-Rioc de Lanriec (Finistère) figurait au rôle des décimes en 1789 sous le nom de Saint-Roch …


Miniature frontispice du ms. Coimbra 722, ayant appartenu à Jean du Chastel

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Armoiries de Tanguy du Chastel et de Jeanne Raguenel de Malestroit sur un manuscrit de L’Histoire ancienne jusqu’à César : Rennes Métropole 2331  

7 Nov 2014
Jean-Luc Deuffic

À propos d’un possesseur ancien du ms. 1 de la Médiathèque des Ursulines de Quimper


© Quimper, Médiathèque des Ursulines, ms 1, f. 259 / BVMM (IRHT)

Le Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France, dans son tome XXII de l’année 1893, consacré aux collections de Nantes, Quimper et Brest, décrit le premier ouvrage de la bibliothèque de Quimper comme étant un manuscrit italien du XVe siècle. D’une très belle écriture, ce recueil de lettres de saint Jérôme a malheureusement perdu nombre de folios.

La seule inscription autographe a été relevée par le catalogue : « Ancien possesseur au XVIIe siècle : M. du Gretz du Dresnay ». Cette lecture est bien entendu fautive et doit être ainsi restituée : « Au seigneur du K/roetz du Dresnay ». Effectivement le « K/ » (= K barré breton) peut se confondre parfois avec un « G ».


© Quimper, Médiathèque des Ursulines, ms 1, f. 1 / BVMM (IRHT)

L’imposante famille du Dresnay, « d’illustre et antienne noblesse », reste bien documentée par l’arrêt de 1668, lequel pourrait nous aider à identifier le membre de cette famille, possesseur du manuscrit de la Médiathèque des Ursulines de Quimper. Au XVIIe siècle plusieurs noms se dégagent :

« François du Dresnay, escuyer, sieur du Kerouetz (1) … qui declare avoir depuis quelques annees (28 novembre 1664) espouzé dame Barbe de Coatlosquet, fille de deffunct messire Guillaume, cheff de nom et d’armes de Coatlosquet, … qu’il est issu d’aultre François du Dresnay, d’un premier mariage (5 septembre 1636) avecq dame Marye de Penmarch, fille de deffunct hault et puissant messire René, barron de Penmarch, et de haulte et puissante dame Janne de Sanzay ».

Ce dernier François était fils de Pierre du Dresnaye et Claude de Rosmar.

C’est probablement dans ces trois noms qu’il faut chercher le possesseur de notre manuscrit. Malheureusement nous n’avons pour lors rien trouvé pour cette époque sur la bibliothèque des Dresnay. Il faut attendre la seconde moitié du XVIIIe siècle pour rencontrer l’ex-libris héraldique des Dresnay (d’argent à une croix anillée de sable, accompagnée de trois cocquilles de gueulles, deux en chef et une en pointe), entre autres celui de Louis-Marie-Ambroise, marquis du Dresnay, qui épousa, à Morlaix, le 10 septembre 1766, Marie-Josèphe-Anne de Coetlosquet, et de son frère puiné, vicomte du Dresnay. Ils étaient les enfants de Michel-Joseph-René, dit le comte du Dresnay, et d’Elisabeth-Françoise de Cornulier.

Le citoyen Cambry, dans son catalogue des objets échappés au vandalisme dans le Finistère, de l’an III, nous fait savoir

qu’ « une des collections les mieux choisies de Morlaix, est celle du ci-devant vicomte du Dresnay » (p. 180), mais précise « J’ai pris note de plus de cent des ouvrages intéressants qu’elle contient ; les cabinets qui les renferment sont exposés à la pluie ; il serait instant de les transporter dans un local plus sûr … La nombreuse bibliothèque du Vte. Dudresnay est bien choisie, sans être celle d’un savant ou d’un homme de lettres … La reliure, le choix des exemplaires et des éditions est à remarquer dans cette jolie bibliothèque, enrichie d’ailleurs des oeuvres de nos meilleurs poëtes, de l’encyclopédie, de romans et de bons dictionnaires. »

Plus loin, il ajoute être « informé par la voie publique qu’une infinité de livres et d’ouvrages précieux ont disparu des diverses bibliothèques, surtout de celle du ci-devant vicomte Du Dresnay (p.190).

Jacques Cambry, Catalogue des objets échappés au vandalisme dans le Finistère : dressé en l’an III (Nouv. éd.) / ; publ. par ordre de l’administration du département. Édité par Julien Trévédy, H. Caillière, Rennes, 1889 (numérisation Gallica).
Docteur G. Vialet, Bibliothèques des bibliophiles bretons anciens, paris, Saffroy, 1931.
Médiathèque des Ursulines de Quimper
BVMM (IRHT)
Dresnay (du) – Réformation de la noblesse (1668) Source : La noblesse de Bretagne devant la Chambre de la Réformation 1668-1671 – Comte de Rosmorduc, 1896, tome III, p. 270-279. Seigneurs de Kerouetz, de Penanru, de Keremarch, etc… http://www.tudchentil.org/spip.php?article776

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© Quimper, Médiathèque des Ursulines, ms 1, f. 1 / BVMM (IRHT)

(1) On écrit également Kerroué

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© Inventaire général, ADAGP


© Région Bretagne

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5 Nov 2014
Jean-Luc Deuffic

NANTES, Musée Dobrée, ms. 9 : les Heures de Charlotte de Miray


© Nantes, Musée Dobrée. BVMM (IRHT)

Parmi les beaux manuscrits du Musée Dobrée de Nantes figure un Livre d’heures du XVe siècle qui nous a laissé les marques d’un ancien possesseur, en l’occurrence les naissances de deux de ses enfants survenues en 1606 et 1610 :

Auiourduy dizehuitiesme de septambre // 1606 a neuf heure du matin est nay // Claude Dargier filz de Louis Dargier et // de Charlote de Miray ses pere et mere // et ses parins Madelon de Miray // grand oncle et Claude De Miray son // oncle et maresne Anne de Cheuvrier a // esté batizé ce mesme jour an leglize // de Vilantroys par messire Pierre Glenet // curé dudit Vilantroys.
Le lundy // huictiesme iour // de nouembre 1610 // a esté bas né // Charle Dargy // & à esté bap // tizé en leglise // de Villentrois & a pour // parrain Charles de Baillou // escuyer sieur des Coignées // & damoiselle Gabrielle de Miray // pour marresne // Lambinet abbé.

Le premier folio de notre Livre d’heures porte en effet cette note barrée :

Je suis a Charlotte // de Miray.

Le 14 juin 1605, Charlotte de Miray épousa Louis d’Argier, deuxième du nom, de la branche de la Ridelière (Histoire de Berry, Gaspard Thaumas de La Thaumassière, ‎Paris, 1689, p. 1132). Le couple eut trois enfants :
1) Claude, né le 18 septembre 1606, comme nous l’apprend ce manuscrit, fut marié le lundi 4 septembre 1628 à Marie de Martin. Il décéda le 26 mai 1662 à Villentrois.
2) Charles, né le 8 novembre 1610, écuyer seigneur de la Combaudière, épousa le 21 juillet 1637 Anne Françoise de Boutillon.
3) Christophe. Au f. 25v du manuscrit du Musée Dobrée on peut lire : Ce iourduy est nay. La suite, non complétée, devait certainement concerner ce Christophe.


© Nantes, Musée Dobrée. BVMM (IRHT)

La famille d’Argier portait d’argent, à trois tourteaux de gueules, deux en chef et un en pointe. Jean d’Argier a formé la branche de la Ridelière à Villentrois (Indre).

Nous avons utilisé la généalogie en ligne d’Evelyne Dubois sur Genenaet. De même voir le blog.
Description précise du manuscrit dans le catalogue du Musée Dobrée de l’abbé G. Durville.
Photos sur le site BVMM de l’IRHT.

3 Nov 2014
Jean-Luc Deuffic

Signature d’Isabeau d’Ecosse

Isabelle Stuart ou Isabeau d’Écosse (1425 /1427 – 1494 à Vannes), fille de Jacques Ier d’Écosse et de Jeanne Beaufort, fut duchesse consort de Bretagne entre 1442 et 1450 par son mariage avec François Ier de Bretagne.

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Source : Paris, BnF, Lat. 1369, f. 56. Heures d’Isabelle Stuart, duchesse de Bretagne.
Numérisé sur Gallica

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Source : Isabelle Stuart présentée par saint François dans ses Heures : Paris, BnF, Nal 588.
Numérisé sur Gallica

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