18 Oct 2007
Jean-Luc Deuffic

Les Heures de Pierre de Foix, évêque de Vannes (+ 1490) : New York Morgan Library ms 6 et l’enlumineur Simon Marmion

PIERRE DE FOIX, dit le jeune, infant de Navarre, naquit à Pau le 7 février 1449. Il était fils de Gaston IV, comte de Foix et de Bigorre, et d’Eléonore d’Arragon, reine de Navarre. Après avoir fait ses études à Paris et Padoue, il prit le bonnet de docteur à Ferrare, sous Felino Sandei, un des plus grands jurisconsultes de son temps. L’ordre de Saint-François le comptait au nombre de ses membres. La candeur de ses mœurs et les grands progrès qu’il fit pendant sa jeunesse dans les sciences divines, le conduisirent à l’épiscopat. Il fut élu évêque de Vannes le 17 mai 1475 (élection confirmée par le pape Sixte IV le 11 mars 1476), et administrateur d’Aire la même année. Le souverain pontife écrivit au duc de Bretagne, François II, pour lui faire part de cette nouvelle, et pour lui marquer que, dans la première promotion, il honorerait de la pourpre le nouveau prélat. Pierre fit serment de fidélité au duc, son beau-frère, le 13 mai, et ne tarda pas à être admis dans le sacré collège, sous le titre de Saint-Côrne et de Saint-Damien (cardinal-diacre le 18 décembre 1476, pourpre le 15 janvier 1477). Son nom se trouve dans les lettres d’abolition données aux barons qui, en 1485, avaient voulu se saisir du trésorier Landais. Mais cette amnistie ne fut pas capable de le rassurer ; il se retira à Rome, où il mourut le 10 août 1490, et fut enterré dans la basilique de Notre-Dame del Popolo. Tous les auteurs qui ont écrit l’histoire des cardinaux ont parlé très-avantageusement de Pierre de Foix. Il avait eu en commende l’abbaye de Saint-Melaine de Rennes, après avoir résilié celle de Saint-Savin de Tarbes (16 septembre 1485). Sources : Dom H. Morice et Biblio [En ligne])

PIERRE DE FOIX, known as the younger, prince of Navarre, was born in Pau on the 7th February 1449. He was the son of Gaston IV count of Foix and Bigorre, and of Eléonore d’Aragon, queen of Navarre. Having completed his studies in Paris and Padua, he undertook doctoral work in Ferrara under Felino Sandei, one of the greatest legal experts of his time and a member of the Order of St Francis. Pierre’s moral sincerity and great progress during his youth in the holy sciences led him to the Holy Orders. He became bishop of Vannes on the 17th May 1475 (the election was confirmed by pope Sixtus IV on 11th March 1476), and he became the administrator of Aire in the same year. The pontiff wrote to François II, the duke of Brittany, to tell him the news and to remark that, in his first promotion, he would honour the new prelate with the office of cardinal. On the 13th May Pierre made a vow of faithfulness to the duke, his brother-in-law, and was soon promoted in the holy orders under the of SS Corne and Damien (he became cardinal-deacon on the 18th December 1476 and full cardinal on the 15th January 1477). His name can be found on the abolition letters given to the barons who, in 1485, wanted to seize the Breton treasurer Landais. But this pardon was not enough to reassure him, so he went to Rome, where he died on the 10th August 1490, and was buried in the Basilica Notre-Dame del Popolo. Every writer on the history of cardinals speaks highly of Pierre de Foix. He commanded the Abbey of St Melaine in Rennes, after having looked given up that of St Savin in Tarbes (16th September 1485). Taken from Dom H. Morice et Biblio [link].

Pierre de Foix portait comme armes: écartelé aux 1 et 4 d’or à trois pals de gueules, qui est Foix ; aux 2 et 3 d’or à deux vaches de gueules accolées et clarinées d’azur, qui est Béarn ; sur le tout : d’or à deux lions passants de gueules, qui est Bigorre. Source [Heuraldic]
 
La prestigieuse Pierpont Morgan Library conserve (ms 6) dans ses collections le Livre d’Heures de Pierre de Foix dont les spécialistes attribuent la décoration au prince des enlumineurs, le célèbre Simon Marmion. Les Heures de la Vierge, à l’usage de Rome, sont précédées d’un calendrier où l’on remarque quelques saints bretons, dont Salomon (14 février; Vannes, le fête traditionnellement le 25 juin, Rennes, Nantes, Dol, le 8 février), Turiaw (13 juillet), Maudez (10 novembre) et Corentin (12 décembre)
The prestigious Pierpont Morgan Library has, as its manuscript 6, Pierre de Foix’s Book of Hours, whose decoration is attributed by scholars to that prince of illuminators, the famous Simon Marmion. The Heures de la Vierge, in the usage of Rome, are preceded by a calendar in featuring a number of Breton saints, including Salomon (14th February; traditionally celebrated in Vannes on the 25th June, and in Rennes, Nantes, and Dol on the 8th February), Turiaw (13th July), Maudez (10th November) and Corentin (12th December).


(c) New York Pierpont Morgan Library
ms 6, détail, f. 154. Pierre de Foix ?

On trouvera sur le site de la Pierpont Morgan Library une description complète de ce manuscrit:
bibliographie [En ligne
67 images numérisées [En ligne]
Le catalogue Corsair donne comme provenance de ce manuscrit \ »Charles le Goirz (?), Morin\ ». Il s’agit en fait de Charles Le Gouz Morin fils de Pierre Morin et de Catherine Françoise Févret, né le 10 décembre 1685, lequel épousa en première noce Constance de Cirey. Il fut quelques années après son mariage maître ordinaire de la garde-robe de \ »madame la dauphine\ », et se maria par la suite à Marie Anne Loppin.

The Pierpont Morgan Library’s website contains a complete description of this manuscript: bibliography [link] 67 digitised images [link]
The Corsair catalogue the provenance of this manuscript as \ »Charles le Goirz (?), Morin\ ». It is actually Charles Le Gouz Morin, son of Pierre Morin and Catherine Françoise Févret, born on the 10th December 1685, and whose first wife was Constance de Cirey. A few years after his marriage he became the “maître ordinaire de la garde-robe” to the dauphine, and later married Marie Anne Loppin.


Dijon : Hotel Le Gouz de Gerland
(c) [Site]

Pierpont Morgan Library [Lien]
Sur Simon Marmion voir l’excellente notice (avec bibliographie) de Bert Cardon sur le site BAlaT:
[En ligne]
Book Of Hours: Illuminations by Simon Marmion with introduction and commentaries by James Thorpe [En ligne] sur le site de la Huntington Library.
A lire (format pdf) : Dominique Vanwijnsberghe, Mise au point concernant l’enluminure tournaisienne au XVe siècle
[En ligne]
Epitaphe de Simon Marmion:
« En l’église nostre Dame la Grande, en Vallenciennes, estoit ycy devant l’épitaphe de Mre Simon Marmion, peintre, lequel repose derrière le cœur de ladite église, dans la chapelle S. Luc :

« Je suis Simon Marmion vif et mort,
Mort par nature et vif entre les hommes.
Après le vif, moy vif peindiz la mort
Qui durement mal point et que s’amort
A mordre tous, comme nous que mort sommes.
Quand j’ay la mort, dormant le pesant somme,
Resuscité par vif art de peinture,
Aux vivans suis de le mort pourtraiture.

Du maistre peintre à qui devons homaige
Tellement fus peint et illuminé,
Qu’il me créa à sa divine imaige.
Autres voians mes traicts et mon imaige
Ont après moy leurs œuvres patronnez.
Quand j’ai tout peint et tout imaginez,
La mort terrible a broyez mes couleurs;
Au resveiller sont les griefves douleurs.

Ciel, soleil, feu, air, mer, terre visible,
Métaulx, bestiaux, habits rouges, bruns, vers,
Bois, bled, champ, pretz, toute chose sensible,
Par art fabricq ai atteint ès possible,
Aultant ou plus que nuls des plus experts.
Tant vivement que nuls bruicts je n’y perds,
Car j’ay pourtrait tel mort gisant soubz lame

Qu’il semble vif et n’y reste que l’ame.
Les yeulx ont prins doulce réfection ,
Et mes exploictz tant propres et exquis
Qu’ils ont ilunné grande admiration,
Riant object et consolation
Aux empereurs, rois, comtes et marquis.
J’ay décoré par art et sens acquis
Livres, tableaux, chappelles et autels,
Telz que pour lors ne sont gnerre de tels.

Peintres mortels qui prenez patronnaige
Sur mes couleurs, vertes, noires et blancbes;
Quand vous avez pourtraict vos personnaiges,
Après les miens, dont sont grand les sommaiges,
Octroyez nous les doulces biem euillances,
Priez aux saincts dont j’ai fait les semblances
Que l’Eternel peintre pardon me face
Sy que lassus je tire après sa face.

Le jour et l’an de la nativité
Nostre Seigneur, mil avec quatre cens
Quatre vingt noef, lors fort débilité,
La fière mort, par son habileté,
Me despouilla avecq cœur, force et sens.
Vous qui voyez ces imaiges présens,
Pryez faint Luc, dont voicy la chappelle,
Que Dieu lassus en sa gloire m’appelle. »

A même temps que Molinet, vivoient à Valentiennes, Mre Simon Marmion, peintre (auquel le susdit Molinet fit un bel épitaphe ) ; Mre Pierre du Préau, vulgairement nommé Pierart Marmouzet, statuaire ou tailleur d’images et Jerosme de Moyennevile, orfèvre, tous trois excellemment accomplis en leur art et renommés par tout.
(D’après un manuscrit de la Bibliothèque de Cambrai découvert par Le Glay)

Le poète Lemaire a loué Marmion dans sa Couronne margaritique, où il dit de lui :
« Et Marmion, prince d’enluminure,
Dont le nom croist comme paste en levain,
Par les effects de sa noble tournure. »

17 Oct 2007
Jean-Luc Deuffic
Saisissez votre mot de passe pour accéder aux commentaires.

Protégé : Les Heures de Gilles de Tournemine, seigneur breton (+ 1474) : London British Library Harley 5781

Cette publication est protégée par un mot de passe. Pour la voir, veuillez saisir votre mot de passe ci-dessous :

14 Oct 2007
Jean-Luc Deuffic

Le livre, le texte, le temps : la mise en recueils au XIIIe siècle

16-17 novembre 2007
Cette rencontre intervient dans la continuité de travaux à la fois théoriques, descriptifs et philologiques qu’une équipe de chercheurs de l’Université de Genève poursuit depuis plusieurs années sur l’organisation de la documentation écrite du moyen âge et sur l’une de ses particularités à la fois les plus remarquables et les moins étudiées en général pour la diffusion de nombreux types d’écrits : la mise en recueils. Elle devrait permettre à des spécialistes d’horizons d’attente divers, connus pour leur intérêt et pour la valeur de leur contribution à de telles questions, de confronter leurs opinions et leurs préoccupations au sujet d’un problème qui est loin de se restreindre à la seule littérature narrative, mais concerne la plupart des catégories qui contribuent à ce que l’on peut définir comme la « culture livresque » du Moyen Âge et au savoir de cette période.
Programme
Richard Trachsler (Universités de Paris IV-Sorbonne et de Zurich; Institut universitaire de France) : Observations sur les ‘recueils de fabliaux’
Keith Busby (University of Wisconsin) : Le Songe d’Enfer de Raoul de Houdenc dans son contexte manuscrit 
Francis Gingras (Université de Montréal) : Mise en recueil et typologie des genres aux XIIIe et XIVe siècles : romans atypiques et recueils polygénériques (Biausdous, Cristal et Clarie, Durmart le Gallois et Mériadeuc)
Milena Mikhaïlova (Université de Limoges) : Jointures à distance : le cas du manuscrit BNF f. fr. 2430
Christopher Lucken (Universités de Paris-VIII et de Genève) : Ouvrage didactique ou lettre d’amour ? Le Bestiaire d’Amours de Richard de Fournival à la lumière de son environnement textuel
Brigitte Roux (Université de Genève) : Le Livre du Trésor de Brunetto Latin et la représentation de l’auteur
Les projets \ »Hypercodex\ » et \ »Christine de Pizan, the Making of the Queen’s Manuscript (London, British Library Harley Ms 4431)\ » : démonstration et commentaires (Olivier Collet, Amy Heneveld, Darko Jovanovic; Tania van Hemelryck (Université catholique de Louvain-la-Neuve et GRMF)
Gilbert Fournier : Un, cent, cent mille ou les collections dans la tradition manuscrite des sermons allemands de Maître Eckhart
Alison Stones (Université de Pittsbugh, Département d’Histoire de l’Art) : Le rôle des prières dans les recueils : les Miracles de Nostre Dame de Gautier de Coinci
Anne-Françoise Leurquin (IRHT) : Structuration et mise en recueil dans quelques légendiers français
Marie-Laure Savoye (IRHT) : Semis, transplantation et greffe : les techniques de la compilation dans le Rosarius 
Chantal Connochie-Bourgne (Université de Provence-Aix-Marseille I) : Diversité et homogénéité des recueils de textes didactiques (“ livres de clergie ” et “ roman ”) 
Joëlle Ducos (Université de Bordeau) : Compilation astronomique et mise en recueil : Li compilations de la science des estoiles de Léopold d’Autriche
Giulano di Bacco (Université de Cambridge) : Books and readers of medieval treatises about music 
Contact: olivier [point] collet (at) lettres.unige [point] ch
Université de Genève. Département MELA
5, rue de Candolle – 1211 Genève 4

14 Oct 2007
Jean-Luc Deuffic

Les Heures de Pierre II, duc de Bretagne

Le Livre d’Heures de Pierre II, duc de Bretagne (1450-1457), conservé aujourd’hui dans le fonds latin de la Bibliothèque nationale de France sous la cote 1159, est l’un des plus précieux manuscrits qui nous soient restés de l’entourage ducal breton au Moyen Age. C’est un volume de 197 feuillets, écrits à 16 lignes sur vélin, et mesurant 188 sur 130 mm, avec une justification de 78 x 57 mm.
Au verso du f. 197, on peut lire ces lignes: Cestes heures sont au duc, qui les trouuera si les range. Et il aura bonnes trouuuailles …
Le calendrier (f. 1) atteste de l’usage de Nantes, et mentionne les fêtes de plusieurs saints bretons: Felix (év. de Nantes), et Gildas (janvier); Yves, Paterne, Donatien et Rogatien (mai); Tugdual, Similien, Hervé, Méen (juin); Turiaw, Samson (juillet); Paterne (septembre); Clair (év. de Nantes) (octobre); Paterne, Maudez (novembre); Corentin (décembre)


(c) Cliché Paris Bibliothèque nationale de France
 
Composition et décoration:
f. 13 (extraits des quatre évangiles et de la Passion selon saint Jean ), représentation de saint Jean l’évangéliste; f. 15, saint Luc; f. 18, saint Marc; f. 19v, Portement de Croix. f. 21, prières en français et en latin. f. 23, le duc de Bretagne à genoux devant la Vierge tenant l’enfant Jésus; f. 27, le duc à genoux, implorant Dieu le Père f. 32 (matines et laudes de la Vierge), l’Annonciation; f. 41, la Visitation; f. 50 (matines de la Croix et du Saint-Esprit) , le crucifiement, la flagellation, comparution de Notre-Seigneur devant Hérode f. 52 (vêpres et complies de la Vierge, de la Croix et du Saint-Esprit), la Nativité de N. S.; f. 57v, es bergers, le Gloria in excelsis. f. 61v, l’adoration des mages; f. 65v, la Présentation ; dans la bordure, un couple d’amoureux, un chasseur de sanglier; f. 69v, La fuite en Egypte. f. 74v, le couronnement de la Vierge, avec un ange portant l’écusson de Bretagne; f. 80, le jugement dernier; dans la bordure, l’écusson de Bretagne tenu par un ange. f. 80. Psaumes de la Pénitence. f. 90, 98 (litanies, office des morts, à l’usage de Nantes), un enterrement. Dans la bordure, la Mort frappant un jeune homme; un fossoyeur creusant une fosse; à côté, étendu sur le gazon, un corps de femme, de la tête duquel se détache une couronne. f. 125v (suffrages, prières en français et en latin), martyre de S. Eutrope; f. 126v, S. Fiacre; f. 127v, S. Bernardin; f. 128v, S. Vincent Ferrier; f. 129v, S. Jean l’évangéliste. f. 138, N. S. avec les cinq plaies; f. 141, La mesure de la plaie du côté de N. S., portée par quatre anges; f. 146v, S. Germain d’Auxerre; f. 147v, S. Dominique; dans la bordure, S. Dominique prêchant, très joli et très curieux; f. 148v, S. Pierre Martyr, frère Prêcheur; f. 149v, S. Thomas d’Aquin; f. 150v, S. Antoine; f. 151v, Martyre de sainte Apollonie; f. 152v, Ste MagdeIeine; f. 153v, Ste Catherine; f. 154v, Ste Marguerite; f.155v, S Julien; f. 156v, S. Christophe; f.157. S. Sébastien; f. 158v. S. Maudet; écusson de Bretagne et très jolie bordure; f. 159v, martyre de S. Adrien; f. 160v, S. Michel; dans la bordure, une vue du Mont Saint-Michel; f. 161v, S. Jean-Baptiste; f. 162v, S. François d’Assise; f. 163, S. Gilles; f. 164v, Ste Anne, la Vierge et l’enfant Jésus; écusson de Bretagne; f. 165, S. Etienne; f. 166v, Ste Barbe; f. 167v, S. Donatien et S. Rogatien, vêtus d’hermines; f. 168v, Ste Ursule, écusson de Bretagne; f.169v, les Onze mille vierges; f. 170, tous les Saints. f. 172, prières à la Croix, Stabat, suffrages. 

Portraits du duc de Bretagne
Au f. 23, le duc est couvert de ses armes, mais tête nue, vêtu d’une cotte d’armes de drap d’argent semé d’hermines, à genoux et mains jointes devant la Vierge qui tient l’enfant Jésus. Le prie-Dieu ducal est couvert d’un velours bleu semé de fleurons dorés; sur ce prie-Dieu, un livre d’heures à fermoirs. La Vierge vêtue d’une longue draperie blanche, a une tête charmante d’ingénuité et de jeunesse. Du duc à la Vierge se déroule et s’étend un cartouche portant ces, mots: 0 mater Dei, memento mei. Derrière, le duc pend une tapisserie de drap rouge à grands feuillages dorés. Au fond, on aperçoit les voûtes, les arcades, les fenêtres d’une haute église ou chapelle du XVe siècle. Dans la peinture du f. 27, le duc implore Dieu par cette oraison:
« Concede michi, misericors Deus, que tibi placita sunt ardenter concupiscere, prudenter investigare, veraciter agnoscere et perfecte adimplere »
Le duc est revêtu de ses habits ducaux, couronne en tête, manteau de pourpre doublé d’hermines avec camail de même; sa robe, que l’on aperçoit par la fente latérale du manteau, est bleue, et bleue la manche de cette robe couvrant le bras qui sort du manteau. Le prince est sous un dais à pentes, de drap (ou peut-être de velours) vert à ramages dorés; à genoux sur un prie-Dieu cou vert de drap d’or portant un coussin herminé, sur lequel est posé un livre d’heures fermé à tranches dorées. Le fond du tableau, ou si l’on veut, la muraille de l’appartement où se trouve le duc est tendu de drap vert et or; mais de chaque côté du dais descend jusqu’en bas un rideau bleu. Ce portrait, comme le précédent, est délicatement peint. Malheureusement, le Père éternel, auquel le duc adresse sa prière, est beaucoup moins bien traité que la Vierge du f. 23. Il se montre, en haut de la peinture. comme par une lucarne, entouré de langues de feu, tenant en main le globe du monde, barbe blanche, cheveux blancs, et coiffé d’un grand bonnet blanc pointu qui ne lui donne aucune majesté. 
Dans les bordures qui encadrent ce portrait se détachent quatre écussons de Bretagne, diversement soutenus ou accompagnés.
Au f. 192r/v: « Memoire que Monseigneur le Duc a fait veu de jamès ne manger char le jour de Monsr saint Estienne, qui est le lendemain de Nouuel. Et fut fait celui veu durant le siege de Foulgieres. (Fougères, 1449) Le VIIe jour de juillet, l’an mil ccccxviii, nasquit Monseigneur Pierre, à present duc de Bretaigne. Le jour saint Nicolas, ixe jour de may, l’an mil ccccxxvii, nasquit Madame Franczoise d’Amboise, àprésent duchesse de Bretaigne. »
Ce manuscrit passa ensuite dans les collections de Jacques de Foissy X Marguerite de Grenaisie (1).
Sur le premier feuillet de garde, cette inscription:
« Cestes presentes heures apartiennent à Marguerite de grenaysie, ettens veneus de son chieff de ces pere et mere, à present fame de Jacques de Foissy ». A côté de cette note un monogramme unissant les lettres « I F » et « MDG » que l’on retrouve en or sur les plats de la reliure en maroquin rouge à petits fers. Au verso du premier plat et aux f. IIv-III, prières en français et en latin (XVI-XVIIe s.). Anciennes cotes: Colbert 4791; Regius 4661/3. Notes: (1) Marguerite de Grenaisie, veuve du seigneur de Moreines en 1593, est sans doute la petite-fille de Jehan Grenaisie, licencié en lois, conseiller du roi, et maître des comptes au comté blésois qui, avec Nicollas Dreux (ou Dux), dressa l’inventaire de la bibliothèque du château de Blois en 1544. Cf. manuscrit Paris BnF Fr. 5660; A. Franklin, Précis de l’histoire de la bibliothèque du roi, 1875, p. 70-72. Jacques de Foissy, sr de Cresné, de Motheus était écuyer de la petite écurie du roi (Paris BnF, pièces originales, vol. 1171, Foissy, f. 79).

Sources et bibliographie
Arthur de La Borderie, Le livre d’heures et les oraisons d’un duc de Bretagne (1450), dans Bulletin de la Société des bibliophiles bretons, 9e année, 1885-1886, p. 57-71. Léopold Delisle, Cabinet des manuscrits, II, 344. Ph. Lauer, Catalogue général, I, p. 424-425. Victor Leroquais, Les Livres d’Heures, I, p. 75 et II, p. 331 (éd. f. 21v). Christian de Merindol, Le livre peint à la fin du Moyen Age, support privilégié d’une politique dynastique, familiale ou personnelle. Les Miracles de Notre-Dame (B. N., n. a. fr. 24541) et le Livre d’heures de Pierre II de Bretagne (B. N., lat. 1159), dans Pratiques de la culture écrite en France au XVe siècle. Actes du Colloque international du CNRS, Paris, 16–18 mai 1992, organisé en l’honneur de Gilbert Ouy par l’unité de recherche « Culture écrite du Moyen Age tardif », éd. par Monique Ornato et Nicole Pons (Textes et études du Moyen Age 2) Louvain-la-Neuve 1995, Fédération Internationale des Instituts d’Etudes Médiévales, p. 499–514.
Sur le site Paris BnF: Saint Michel combattant le dragon [Lien]