10 Juil 2024
Jean-Luc Deuffic

Le « Livre des simples médecines » de Simon Chabot, apothicaire de Nantes (XVIIe siècle)

Le Livre des simples médecines, un texte en français conservé dans plus de 25 manuscrits enluminés des XVe et XVIe siècles, est une traduction du Tractatus de herbis, un traité latin dérivé du Circa instans compilé au XIIe siècle autour de l’école de médecine de Salerne. Ce livre décrit des substances végétales, minérales ou animales aux vertus thérapeutiques, présentées par ordre alphabétique et illustrées. Nous donnons ci-dessus un feuillet de l’exemplaire de la BnF, Français 12322 (fol. 138v)

Parmi ces manuscrits figure le Paris, BnF, Français 19081 (1), du XVe siècle, probablement écrit en Flandre. Le parcours de cet ouvrage donne à comprendre la circulation des manuscrits entre des territoires bien éloignés. Dans la seconde moitié du XVIe siècle, l’Herboriste se trouvait à Fontainebleau comme le précisent plusieurs inscriptions :

Françoys Presdeseigle, bon marchant mercyer, demourant à Fontainebleaud, où pend pour enseigne le Pillier vert, maison René Habert, filz de deffunct Jehan Habert, son père.
Ce présent livre appartient à honnorable home Françoys Presdeseigle, dem[ourant] à Fontainebleaud, où pend pour enseigne le Pillier vert

Peut-être de la même famille, un François Presdeseigle, marchand marchand drapier et chaussettier, bourgeois de Paris, demeure rue Galande, en la maison du Soleil-d’Or, près de la place Maubert, paroisse Saint-Étienne-du-Mont, à Paris, époux de Marie Le Bé. Il est parrain de Frédéric Lombart, le 1er juin 1587 et le 16 mars 1604, de Charles Content (fds Laborde),.
Le 15 février 1626 notre marchand drapier participe à la consécration de l’autel de Saint-Étienne-du-Mont.
Le 15 mars 1645 fut dressé l’inventaire après décès de François Presdeseigle l’aîné, marchand drapier, demeurant Rue Galande, à la requête de son fils, François Presdeseigle, marchand drapier, dans la même rue, contenant tapisserie, tableaux et livres (Paris, AN, MC/ET/XXXIII/284). Rien pourtant n’indique un rapport avec le Presdeseigle de Fontainebleau.
À Fontainebleau, l’enseigne du « Pilier vert » se trouvait dans la rue, aujourd’hui supprimée, des Fossés, tandis que le « carrefour du Pilier vert » faisait le coin de la place d’Armes et de la rue de la Chancellerie.
Le mot pilier aurait ici le sens de pileur, ou garçon de laboratoire pilant des drogues ; le pileur de l’enseigne était habillé de vert (2).

Dès la fin du XVIe siècle ou le commencement du XVIIe, le manuscrit quitte Fontainebleau pour Nantes, et devient la propriété d’un apothicaire de la ville ligérienne, Simon Chabot, sur lequel nous ne possédons que peu d’éléments biographiques.
On sait, quand même, que notre maître apothicaire épouse, à Saint-Denis de Nantes, le 27 janvier 1626, Françoise Mainguy, fille de Jean Mainguy (sieur de Pineau, la Noë-Huette et de L’Epine, à Couëron), Me procureur à la Cour, et d’Ester Millet dont le frère, Jean, exerce comme greffier de la Cour de l’Officialité de Nantes.
Jean Doucet (3) nous apprend qu’en 1616, Simon Chabot, avait son officine dans la Grand-Rue, près le Pilori, et qu’en 1663, Françoise Mainguy était veuve.


Place du Pilori, à Nantes


Détail de la Maison des apothicaires de Nantes, rue des Carmes

Notes

(1) Manuscrit numérisé (en noir et blanc, hélas !) sur Gallica
(2) Les anciennes enseignes de Fontainebleau, par F. Herbet, avec un supplément par E. Thoison, Les enseignes et les rues de Fontainebleau au XIXe siècle, par M. Bourges, Enseignes, logis historiques, villas et rues d’Avon, par Th. Fleureau, (Fontainebleau), 1898.
(3) Les apothicaires Nantais sous l’ancien régime : contribution à l’histoire de la pharmacie à Nantes, Lussaud, 1959, p. 283.

Balade : Un apothicaire dans la ville
sur le site des Archives départementales de Nantes
https://archives.loire-atlantique.fr/44/balade-un-apothicaire-dans-la-ville/c_29999

Paris, BnF, Français 19081, dernier folio. Inscriptions

Bibliographie : François Avril« Étude codicologique et artistique », dans Matthaeus Platearius, Ghislaine Malandin (traduction et adaptation), François Avril (étude codicologique) et Pierre Lieutaghi (commentaire historique, botanique et médical), Le Livre des simples médecines : d’après le manuscrit français 12322 de la Bibliothèque nationale de Paris, Paris: éditions Ozalid et textes cardinaux, 1986.
Yves Baron, « François Le Duc, apothicaire nantais », dans Revue d’Histoire de la Pharmacie, t. 107, 1939, p. 158-161 [ en ligne ]

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