Les Heures de René d’Anglure et de Catherine de Bouzey : University of Kentucky Libraries, Kentuckiensis IX
Le professeur Scott Gwara (Université de Sud-Caroline), dont on connait assez la passion pour les manuscrits, m’ayant contacté en vue d’identifier les armes d’un Livre d’heures (composite) de la Bibliothèque universitaire de Kentucky (USA, Special Collections, Kentuckiensis IX), la résolution de l’énigme ne s’est pas faite attendre (note1, voir in fine). Avec le précieux concours de François du Fou, les possesseurs représentés au bas d’une miniature de la Pieta, au f. 128, ont été assez vite reconnus : il s’agit de René d’Anglure et de Catherine de Bouzey,
Mariés le 6 mai 1485 par contrat, René d’Anglure, chevalier, vicomte de Blagny, conseiller et chabellan du roi, et Catherine de Bouzey, fille de nobles personnes Jean de Bouzey, seigneur de Saint-Germain, et de Marguerite de Brions, dame de Givry, portaient respectivement : écartelé aux 1 et 4, d’or semé de croissants de gueules soutenant chacun un grelot d’argent (Anglure), aux 2 et 3, à 3 pals de vair au chef chargé d’une merlette (Châtillon), et : d’or au lion de sable (de Bouzey).
René d’Anglure était le fils de Simon, dit Saladin d’Anglure, vicomte d’Etoge, chambellan de René d’Anjou, chevalier de l’Ordre du Croissant (+ aout 1499) et de (marié en 1458) Jeanne de Neufchâtel, vicomtesse de Blaigny, dame d’Ancy-le-Franc, morte en juillet 1504, fille de Humbert de Neufchâtel, seigneur de Nanteuil-la-Fosse et de Claude de Tannerre, dame de Plancy.
© University of Kentucky Libraries, Special Collections. Manuscrit Kentuckiensis IX, f. 128. Pieta. Avec la permission de Matt Harris et de ses collègues.
Catherine de Bouzey présentée par sainte Catherine (avec sa roue) ; René d’Anglure par saint René, évêque de Naples (cette partie est très effacée, mais on devine la crosse et la mitre. Voir la totalité du folio).
La prière \ »Vray Dieu de pitié et // vous benoiste pucelle …\ » me semble inédite. Pour une description plus complète et quelques illustrations voir le site de la Bibliothèque universitaire de Kentucky [ en ligne ]. Curieux manuscrit composé de deux Livres d’heures bien distincts et de date éloignée (XIV et XVe siècles).
La tombe commune des possesseurs du Kentuckiensis IX, René d’Anglure et son épouse, Catherine de Bouzey, peut se voir à Etoges (Champage-Ardenne, France), dans l’église Saint-Sulpice- Saint-Antoine. Sur la dalle de marbre noir se lit cette épitaphe (lecture de Moreri) :
Cy gist messire René d’Anglure en son vivant chevalier vicomte seigneur d’Estoges & de Ferchampenoise ayant la charge & conduite de cent hommes d’armes au service des rois de France en leurs guerres tant en France qu’en Italie aux batailles de Pandin*, Ravenes**, Ecte*** & autres batailles & rencontres qui trépassa le sixième jour d’octobre 1529 & dame Catherine de Bouzey sa femme & épouse dame de Givry en Argongne issue & sortie de hauts & puissans princes messieurs les comtes de Rodemack laquelle trépassa le dixième jour de mai l’an 1527 [* Pavie : 1525 ; ** Ravenne : 1512 ; *** Sainte-Brigitte ] :
[ Source ]
ETOGES, église Saint-Sulpice-Saint-Antoine : tombeau composé de 2 gisants en albâtre et d’une dalle avec épitaphe (restauré) – Le lion, symbole de la force et du pouvoir, est généralement associé à l’homme, alors que pour la femme, l’animal est le lévrier, symbole de fidélité : voir par exemple le tombeau de François II de Bretagne, à Nantes, ou celui de René de Beauvau et Claude de Baudoche au Musée Lorrain © Inventaire – Merci à François du Fou pour cette remarque.
Armes d’Anglure / Châtillon sur le monument funéraire de François d’Anglure – © Inventaire –
BIBLIO : Robert Neuville, Les Gisants de l’église d’Etoges, 1969 (non consulté). – Généalogie d’Anglure, branche des comtes d’Etoge, par Moreri en ligne – La galerie d’Etoges en ligne –
MANUSCRITS EN RELATION
Stockholm, Koninklijke Bibliotheek. Ms. A 228, Heures à l’usage de Cambrai de Marie de Verres et de François d’Anglure, fils de René d’Anglure. 38 grandes miniatures. Notes sur la famille de François d’Anglure. 2 campagnes, dont ca 1480, atelier de Simon Marmion. Quand la peinture était dans les livres : Melanges en l’honneur de Francois Avril, Brepols, 2007, p. 149-150. Illuminated manuscripts and other remarkable documents from the collections of the Royal Library, Stockholm, Catalogue exposition, juin-sept. 1963, Stockholm, 1963, p. 14. [ Hanno Wijsman : Luxury Bound ]
Paris, BnF, Fr. 20318. Début XVe s. Valère Maxime, trad. de Simon de Hesdin, Faits et dits memorables. Armes d’Anglure / Châtillon dans l’initiale du f. 1.
© Paris, BnF, Fr. 20318, f. 1. Début XVe s. Page frontispice de Valère Maxime, trad. de Simon de Hesdin, Faits et dits memorables.
Voir notice du manuscrit sur le site de l’ENC, Miroir des classiques (Frédéric Duval et Françoise Vielliard)
© Paris, BnF, Fr. 25204. Statuts de l’ordre du Croissant, fondé par René d’Anjou (1448), f. 46. \ »Messire Saladin d’Anglure Vicomte d’Estauges // & Seigneur de Nogent\ », père de René d’Anglure Base BnF Images.
© Paris, BnF, Fr. 25238 [ source : gallica ] – Merci à François du Fou pour m’avoir signalé ce ms.
GLANES GENEALOGIQUES DES BOUZEY…
… Il aurait aussi apparu aux dits commissaires, par une sentence des assises de notre dite province de Vôge du 19 décembre 1435 par le testament du dit sieur Thiriet de Bouzey du 21 avril 1436, et par le partage des biens du 25 novembre. Avant comme aussi par deux autres titres des années 1473 et 1499 que le sieur Guillaume de Bouzey qui avait épousé Jeanne de Malain, et le sieur Liébaut de Bouzey marié à catherine de Thuillières, étaient frères des dits Vautrin et Jean Bougno de Bouzey. Que Barbe de Bouzey aurait épousé le sieur Jacques de Savigny, seigneur de Monthureux, et que Catherine de Bouzey aurait été mariée au sieur René d’Anglure, vicomte d’Estôges et de Bassigny. Le sieur Nicolas de Bouzey, seigneur du dit Boouzey, du Ballion de Saint Elophe et de Brancourt voulant imiter ses ancêtres aurait épousé Didière de Barezey, dont il aurait eu le sieur Mengin de Bouzey, auquel il aurait inspiré ses sentiments, ce qui aurait été reconnu par l’alliance qu’il aurait contracté le 30 juin 1496 avec damoiselle Adeline de Salvan, fille du sieur Jeannon de Salvan, seigneur de Valleroy aux Saules, et de dame Adeline d’Autrey son épouse, le sieur Jean de Bouzey, seigneur de Dombrot et de Saint Germain, fils du dit Jean Bougno de Bouzey et petit-fils de thiriet de Bouzey, les sieurs Georges de Savigny, Jean du Moustier et François de la Vaux, auraient assisté à la passation de leur contrat de mariage, par lequel il aurait été stipulé, qu’en considération d’une donation de dix huit mille francs de préciput qui aurait été faite à la dite Adeline de Salvan par ses pères et mères, les enfants qui naîtraient de leur mariage seraient tenus et obligés de porter les noms et armes de la Maison de Salvan, et ne pourraient reprendre celui et celles de Bouzey qu’en cas que la ligne collatérale de la Maison du dit Bouzey viendrait à s’éteindre, ce qui aurait été observé par le sieur Jean de Bouzey, leur fils, seigneur du dit Bouzey qui aurait commencé à porter le nom de Salvan, pour lors éteint, il aurait épousé damoiselle Antoinette de Montfleur, fille du sieur Georges de montfleur, seigneur de Fontenoy les Montbozon, et de dame Marguerite de Pauyette, et dans la passation de leur contrat de mariage du 28 juin 1547… [ source ]
LIENS
<> La page de Scott Gwara
<> Le département Special Collections de l’Université de Kentucky
<> Abrégé de la vie de saint René, évêque d’Angers ; par l’abbé René[ numérisé sur Gallica ]
© Paris, BnF, Latin 1156A, f. 61. Ca 1435. Heures de René d’Anjou : saint René et portrait de Louis II d’Anjou. Maître de Rohan.
POSTSCRIPTUM
(1) François AVRIL me fait savoir qu’il avait déjà lui-même identifié René d’Anglure et Catherine de Bouzey dans le Kentuckiensis IX , information publiée par [Maxence Hermant, \ »La commande artistique en Champagne du Nord au XVIe siècle : les vicomtes d’Étoges et leurs tombeaux\ », dans Etudes marnaises, 2006, p. 95-120. Je l’en remercie. Dans ce même article Maxence Hermant (BnF) identifie les armes du ms BnF, Lat. 20318, cité plus haut.
La famille d’Anglure fait partie de l’histoire de saint Ange, non seulement par la donation que fait la Duchese d’Etampes bâtisseuse de la célèbre " maison de plaisance bâtie à la modferne", mais aussi par les démélés de Marguerite Hurault de Chevigny après arbitrage avec son beau frère d’Etoges, sur la cession de Challeau et Dormelles