Glanes bretonnes : métiers du livre et étudiants à Paris au XVIe siècle
Nous avons relevé ci-dessous quelques documents des Archives Nationales (Paris) relatifs aux livres ou aux étudiants bretons de Paris :
Mise en serviteur et apprenti, pour deux ans, par Yves Maguet, prêtre, principal du collège de Kerambert, d’Alain Moalic, originaire de Landerneau en Bretagne, âgé de vingt-deux ans, chez Rolin de Breuille, libraire et relieur de livres, rue des Carmes, qui lui fournira le gîte et le couvert et recevra dix écus d’or soleil, dont deux écus comptant, deux à Pâques, deux à la Saint-Remi et le reste à Noël 1550.
17 octobre 1549 – MC/ET/XXXIII/34 , fol. XIIIxxXVI, fol. 276.
Bail viager, à la vie des deux époux, par le collège de Tréguier, à Hervé Bolsec, libraire et bourgeois de Paris, marié à Marie Bénard, de deux étables contiguës, ‘une vifz entre deulz’, dépendant du collège, sises rue Saint-Jean-de-Latran, dites la Grande et la Petite étable, mesurant trente-quatre pieds de long, que les preneurs convertiront en deux ouvroirs ; loyer annuel : 6 l. t. 29 juillet 1522 – MC/ET/XXXIII/7, fol. 152.
Olivier Dargant, natif de Thogonenens (??), diocèse de Tréguier, se baille comme serviteur et apprenti pour 2 ans de ce jour à Georges Sauberon, marchand libraire et relieur de livres à Paris. 14 juin 1565 – MC/ET/XXXIII/50.
Assemblée en la salle du Collège de Tréguier des bretons bretonnants natifs du pays de la Basse Bretagne qui constitue procureur maître Louis Utin, secrétaire de monseigneur de Martigues, pour solliciter du prévôt de Paris la nomination d’un nouveau chapelain et garde perpétuel de la chapelle et confrérie Saint-Yves à Paris en remplacement de défunt Jean Le Bastard, prêtre. 11 novembre 1568. MC/ET/XXXIII/188.
Reçu par Guy Leclerc, Yves Cosic, prêtres, et Geoffroy Legal, agissant comme procureurs de Jean Guefferus et Yves Sayte, héritiers d’Alain Guefferus, docteur régent en la Faculté de théologie en l’Université de Paris, à Louis Lasserre, prêtre, proviseur du collège royal de Champagne, dit de Navarre, exécuteur testamentaire d’Alain Guefferus : 1° de 31 l. 3 s. 6 d. t., excédant de la recette sur la dépense occasionnée par la pension et l’écolage audit collège de François \ »Karoulas\ », fils de Tanneguy \ »Karoulas\ », seigneur de \ »Karoulas en Bretagne\ » ; 2° d’un écu soleil, dû au défunt par Georges Mulot, docteur en théologie ; 3° de l’Anti-Lutherus Jodoci Clichtovei ( 1 ) et du Propugnaculum ecclesie ( 2 ), jadis prêtés par le défunt aux Chartreux près Paris.- 19 (fol. XLIII) 19 décembre 1539.
Procuration par Jean Le Roy, prêtre du diocèse de Cornouaille en Basse-Bretagne, étudiant à Paris, demeurant en la maison de Bene Natus, (Bienné ?) imprimeur ès langues grecques et latines, aux fermiers de l’abbaye de Langonnet pour recevoir 10 écus d’or qu’il a prêtés à Yves Benoist, maître ès arts, natif de la paroisse de Plusquellec, audit diocèse. 9 décembre 1579. MC/ET/XXXIII/195.
Ratification par Guillaume Littré, marchand et imprimeur de livres, rue Saint-Christophe, de la vente faite par son procureur, Jean Moysan, à Alain Littré, fils de Pierre Littré, le 6 juillet 1544, du quart des ‘ediffices et droictz’ appartenant à Guillaume Littré, sis à ‘Restourmen‘ ( 3 ), paroisse de Édern, moyennant treize écus soleil, somme que Guillaume Littré reconnaît avoir reçue des mains de Guillaume Pochet, messager de Jean Moysan. 3 octobre 1544 – MC/ET/XXXIII/19 , fol. 136 Vo.
( 1 ) Simon de Colines, 1524, in-f°. ( 2 ) Ibid, 1526. ( 3 ) Aujourd’hui Roc’htourment
Le Landernéen « Charles de Rochemagne le Rouss », capucin, converti à la religion réformée (1619)
Traquant ex-libris et anciennes provenances, j’ai fait la rencontre récente d’une plaquette de 14 pages in-8° (non encore examinée) dont le titre en lui-même est assez significatif pour être publié entièrement :
Declaration de Charles de Rochemagne Ie Rouss, natif de Landernau en Basse Bretaigne, ci-deuant Capucin au conuent des Capucins de Chasteleraud, faite publiquement en l’Eglise Reformée dudit lieu, le Dimanche 22 de Septembre 1619. Ou sont contenues les raisons et motifs pour lesquels il a abjuré ses voeuz monastiques, et s’est retiré de dessous Ie joug de la Tyrannie Papale. Ne jugez point selon l’apparence, mais jugez d’un droit iugement. I Jean, 7 24. A Lodvn de l’impression de La-Barre, 1619.
Référence prise dans les Kerkhistorisch archief, volumes 1 à 2, Amsterdam, 1857, p. 414, le seul exemplaire connu, semble-t-il, se trouve aujourd’hui conservé à l’Université de Leiden (Special Collections (KL) Bibliotheque Wallonne, BIBWAL I 124: 1 ). Il y eut un second tirage, puisque les exemplaires de Paris, BnF (D2- 10764) et de la BM de Toulouse (Fa D 19218 (63), datés de 1620, offrent un libellé quelque peu diffèrent :
Declaration de Charles de Rochemagne le Rouss. natif de landerneau en Basse Bretagne cy devant Capucin au couvent des Capucins de Chasteleraud, faite publiquement en l’église réformée dudit lieu, le… 22. de janvier 1620. Où sont contenues les causes et motifs pour lesquels il a abjuré ses voeux monastiques et s’est retiré de dessous… la tyrannie papale. Jouxte la copie imprimée à Loudun, 1620.
« Charles de Rochemagne le Rouss », se dit natif de Landerneau. Le patronyme Rochemagne est inconnu à la Bretagne : s’agit-il d’une traduction française d’un nom breton (Rochemeur, Rosmeur ?) Probablement s’appelait-il « Le Roux ». Malheureusement nous n’avons pas trouvé trace de sa naissance à Landerneau, seuls les registres paroissiaux de la paroisse de Saint-Thomas remontent au-delà de 1600. Il ne fit certainement pas profession chez les Capucins de l’ancienne cité léonarde, puisque l’installation du couvent de cette ville ne date que de 1633. Il rejoignit donc celui de Chatellerault fondé en 1612 dans le faubourg Sainte-Catherine.
Quoiqu’il en soit, après sa conversion, Charles de Rochemagne, s’installa à Vitré, un des grands pôles, avec Nantes, du calvinisme breton (http://protestantsbretons.fr/histoire/etudes/questions-sur-vitre-1/)
En effet, son nom se retrouve dans les registres de l’église réformée de Vitré, à la date du 12 juillet 1620 (1), quand il se marie avec Anne Chapelais, née le 12 mars 1597 de Guy Chapelais, sieur de la Vigne, tailleur d’habits et de Judith de Launay.
Plusieurs enfants naîtront de son union avec Anne:
Elisabeth, 12 avril 1621
Charlotte, 11 mars 1622
Philippe, 5 avril 1624
Jeanne, 25 juin 1625
Marie, 18 novembre 1626
Philippe, 26 juillet 1628
Charles, 28 décembre 1630
Anne morte le 5 mars 1634, Charles de Rochemagne se réfugie par la suite à Guernesey, où il mourut à un âge très-avancé, en mars 1672 :
Il remplissait dans l’église paroissiale de Saint-Pierre-Port l’office de Lecteur, c’est-à-dire de celui à qui il appartenait de lire les saintes Ecritures, de conduire le chant, et d’aider le ministre dans quelques-uns de ses devoirs. Il était aussi maître de l’école paroissiale. Il s’est remarié deux fois à Guernesey, d’abord en avril 1641, à Jeanne Arthur, et puis en mars 1653, à Marguerite Hodon (Bulletin archéologique de l’Association bretonne, 1877, p. 33).
Gilles-André de La Roque de La Lontière, dans son Histoire généalogique de la maison de Harcourt, 1662, p. 622-623, fait mention de « Charles de Rochemagne Breton, en la généalogie manuscrite qu’il a publiée de la maison de Montgommery », qui sans aucun doute, se rapporte à notre personnage.
NOTE
(1) Je remercie Jean-Claude Bourgeois (groupe Généalogistes du Finistère) pour une précision concernant cette date.
BIBLIO
Paul Paris-Jallobert, Anciens registres paroissiaux de Bretagne: baptêmes, mariages, Volume 1, Eglise protestante de Vitré, Rennes, 1890,, p. 25, 140.
LIENS
Le blog de Jean-Yves CARLUER : Les Protestants bretons
LE PROTESTANTISME EN BRETAGNE AUX XVIe, XVIIe & XVIIIe siècles, par Jean-Luc TULOT
L’incunable de la « Cité de Dieu » du frère carme Bertrand Estienne
Bertrand Estienne (ou Etienne, Bertrandus Stephani) et Jean Marchand (Johannes Mercatoris), carmes de la province de Touraine, bacheliers en théologie et lecteurs en l’Université de Paris, ont marqué l’histoire de l’imprimerie lorsqu’à la demande de Louis Martineau (également tourangeau), ils corrigèrent le commentaire de leur confrère anglais John Bacon sur le troisème livre des Sentences, qui sera imprimé à Paris le 15 janvier 1485 (n.s.). Cette précieuse édition in-folio est aujourd’ui conservée dans plusieurs bibliothèques (Durham, Ushaw College; Edinburgh UL (New College) ; Paris Mazarine; Valognes BM ; Leipzig UB ; Nürnberg StB ; Cambridge MA, Harvard College Library, Houghton Library, etc)
Nous avons eu la chance de découvrir le nom de Bertrand Estienne sur un autre incunable dont il fut un certain temps possesseur. En effet, à la Bibliothèque de la Sorbonne se trouve un exemplaire (Rés. In 70) de la Cité de Dieu de saint Augustin (De civitate Dei comment. Thomas Valois et Nicolaus Triveth), imprimé à Bâle par Johann Amerbach, le 13 février 1489, portant cette note manuscrite : « Ce livre appartient a fresre Bertram Estienne».
Par la suite, au courant du XVIe siècle, l’ouvrage a appartenu à Jérôme [?], religieux du prieuré clunisien de Saint-Martin des Champs à Paris, et au frère Jean, gardien du couvent (des Franciscains ?) de Quimper, sans que l’on ne connaisse exactement la chronologie de ses différentes possessions : « Dompnus Jheronimus [gratté] religiosus Sancti Martini de Campis sibi pertinet hunc librum, xiiii s. P. » ; « Ex libris fratris Johannis prepositi conventus Corizopitensis ». Un examen des écritures pourrait peut-être le déterminer.
SUDOC / Référence
Biblio : A. Claudin, L’histoire de l’imprimerie, t. 1, Paris, 1900, p. 300-301.
Exemplaire de la Cité de Dieu de la Bridwell Library
Prochaines ventes : Sotheby’s, Livres d’heures et statuts
Sotheby’s 8 juillet 2014 : une des belles ventes de l’année …
Lot 16: un feuillet avec scènes de la vie de saint Denis, enluminées par Richard et Jeanne de Montbaston (XIIIe s.)
Livres d’heures : lot 60, 61, 62, 63, 64 (Peut-être décoré à Rennes), 65
Catalogue en ligne : http://www.sothebys.com/pdf/2014/L14240/index.html
Alde – 27/06/2014, lot 58. [HEURES]. Horæ ad usum Romanum. [Flandres (?), fin du XVe siècle]. Manuscrit sur vélin de 161 f.n.ch. 130 x 90 mm. Reliure XVIe s.
http://catalogue.gazette-drouot.com/html/g/fiche.jsp?id=4029334
Heures (Flandres?)
SARTHE ENCHERES – 28 juin 2014. Lot 255. Livre d’heures. XVe s. 158 pages de velin. 175 x 115 mm. 8 miniatures. 4 feuillets de velin portant des annotations manuscrites, Reliure du XVIe siècle. Provenance : 1) vers 1510: Gillette de Vassau épouse d’un Pierre Clément… (p. 5r). 2) vers 1580: demoiselle Loyse Dehault épouse d’un de Grand de la région de Chaumont, (Haute Marne) (p. 2r). 3) vers 1620: Alexandre de Grand, fils des précédents (p. 162v). 4) vers 1663: Nicolas de Grand, fils du précédent (ibid.). 5) famille CAILLAUX à partir de 1812, Joseph Caillaux, etc …Baronne ROGER née Caillaux.
http://tiny.cc/iywygx
Heures à l’usage de Langres
AUDAP – MIRABAUD – Drouot Richelieu – 26 juin 2014- Lot 51 : Livre d’heures à l’usage de Langres – première moitié du XVe siècle ; pet. in-8 (100 x 80 mm) de 153 f. à 15 longues lignes par page, reliure du début du XVIIIe s.
http://tiny.cc/82wygx
Maître Hervé LEGROUX et Hôtel des Ventes de RODEZ – 19 juin 2014
Règles et statuts de l’église collégiale et chapitre de Saint Laurent de Rouergue – XVe s.